Les arbres, une thérapie naturelle et gratuite

Chers amis,

Les arbres nous soignent. Quand je dis « soigner », je parle bien de maladies, aussi différentes que la dépression, les problèmes cardiovasculaires et même les cancers.

Vous allez voir, je ne suis pas en train de divaguer mais de parler de conclusions scientifiques établies par des chercheurs japonais.

Il n’y avait sans doute que là-bas, au Japon, que le pouvoir thérapeutique des arbres pouvait être mis au jour.

Tous les services que nous rendent les arbres

L’usage que nous faisons des arbres et de leur bois, chez nous en Occident, est tellement « banal » que nous oublions tout ce que nous leur devons.

Les arbres nous nourrissent en nous fournissant des fruits juteux – pêches, abricots, brugnons – des fruits à coque – noix, noisettes, noix du Brésil – des olives en apéritifs, des cerises en dessert.

Les arbres nous rafraîchissent et nous réchauffent en nous fournissant ombre et fraîcheur quand il fait chaud, et du bois à mettre dans la cheminée quand il fait froid.

Les arbres nous abritent et nous protègent : bien avant l’arrivée du béton et du ciment, le bois était le matériau de construction le plus pratique et le plus répandu.

Aujourd’hui, des pays comme l’Autriche et la Suisse sont en train de revenir au bois pour la construction durable de leurs édifices.

À gauche, la charpente du centre Pompidou, à Metz ; à droite, la structure d’une « nouvelle » maison traditionnelle en Autriche.

(Je vous expliquerai dans ma prochaine lettre comment un « intérieur bois » influence le cerveau et l’humeur, c’est inattendu et remarquable !)

Les arbres peuplent nos intérieurs : ils sont le matériau noble dont sont faits nos lits, nos armoires, nos bureaux, les berceaux de nos nourrissons.

Les arbres nous transportent : les pneus en caoutchouc viennent du latex produit par un arbre, l’hévéa !

Et puis… n’oublions que ce sont les forêts qui, en majeure partie, produisent l’oxygène que nous respirons.

Et donc, oui, les arbres nous soignent.

Le plus répandu des médicaments

Les feuilles, la sève et l’écorce des arbres sont à la base de très nombreuses thérapies – vous savez que le printemps est la saison des cures de sèves de bouleau, par exemple.

L’aspirine et d’autres antalgiques parmi les plus consommés au monde ont pour base une substance tirée de l’écorce de saule : l’acide salicylique. Dans l’Antiquité déjà on en faisait des décoctions pour soigner fièvres et douleurs.

Les pharmacopées traditionnelles du monde entier, de la Chine à l’Amazonie, reposent en grande partie sur différentes essences d’arbres. Il y en a 70 000 en tout, du gingko biloba au camphrier, un large choix !

Mais des chercheurs japonais, depuis une quinzaine d’années, explorent une autre façon dont les arbres peuvent nous soigner.

C’est une véritable science de la sylvothérapie (« thérapie par les arbres ») qui est en train d’émerger là-bas – à prendre très au sérieux.

Pourquoi le Japon prend soin de ses forêts

Souvent, quand nous pensons au Japon, nous viennent immédiatement en tête des images des rues surpeuplées de Tokyo… des pendulaires empruntant des lignes de métro bondées… une mégapole inhumaine et écrasante.

Mais regardez cette carte :

69 % du territoire japonais est recouvert de forêts[1].

Cela constitue plus des deux tiers de la superficie du pays.

En France, à titre de comparaison, nous n’atteignons même pas les 30 %[2].

Ça n’est pas grâce à une politique de respect de la nature (très fort dans la religion shintoïste) que le Japon dispose aujourd’hui d’un tel couvert forestier.

C’est une réaction à… la déforestation massive qu’a connu l’archipel au Moyen Âge.

Le chercheur américain Jared Diamond y a consacré un passionnant chapitre dans son célèbre essai Effondrement – comment les civilisations décident de leur disparition ou de leur survie[3].

Il raconte comment le pouvoir impérial, à l’ère Edo, a pris conscience du risque lié à la déforestation.

Les Japonais d’avant 1600 coupaient tellement de bois que les forêts étaient en train de mourir : les arbres n’avaient plus le temps de pousser.

Les autorités ont introduit des règles extrêmement rigoureuses pour protéger ses forêts.

Cette politique protectrice perdure aujourd’hui.

Mais elle s’est renforcée et transformée, devenant une philosophie et une pratique thérapeutique à part entière, antidote aux problèmes de civilisation engendrés par la vie urbaine.

Les Japonais ont appelé cet « antidote » le Shinrin Yoku, expression qu’on pourrait vaguement traduire en « bains de forêts ».

La médecine des arbres

Quand les Japonais ont commencé à pratiquer le Shinrin Yoku dans les années 1980, ça n’était qu’un loisir.

Puis, des chercheurs ont commencé à s’intéresser de près aux effets sur la santé de cette pratique.

Ce qu’ils ont découvert était si impressionnant qu’ils ont créé le concept de sylvothérapie, sur laquelle le gouvernement a débloqué en quelques années 470 millions de yens (près de 4 millions d’euros) pour mener des recherches.

Ils ont découvert comment la sylvothérapie permettrait de lutter contre[4] :

  • les risques de cancer ;
  • les maladies cardiovasculaires ;
  • les ulcères et maux d’estomac ;
  • le syndrome du côlon irritable ;
  • la dysautonomie (dysfonctionnement du système nerveux autonome) ;
  • la dépression ;
  • les troubles du sommeil ;
  • la perte ou la prise de poids ;
  • la difficulté à cicatriser ;
  • les maux de dos, de nuque et d’épaules ;
  • le rhume.

Je vous expliquerai dans ma prochaine lettre comment les chercheurs japonais sont parvenus à ces incroyables conclusions.

Mais retenez déjà qu’aujourd’hui, au Japon, on compte 63 centres officiels de sylvothérapie[5].

Portez-vous bien,

Rodolphe Bacquet


Sources

[1] Pr Miyazaki (Y.), Shinrin Yoku, le secret de santé naturelle des Japonais, Guy Trédaniel éditeur, 24 avril 2018, p. 52.

[2] « Forêt en France », Wikipédia, consulté le 23 mai 2019, disponible sur https://fr.wikipedia.org/wiki/For%C3%AAt_en_France

[3] Diamond (J.), Effondrement – comment les civilisations décident de leur disparition ou de leur survie, Gallimard, « NRF essais », Paris, 11 mai 2006.

[4] Pr Miyazaki (Y.), Shinrin Yoku, Shinrin Yoku, le secret de santé naturelle des Japonais, Guy Trédaniel éditeur, 24 avril 2018, op. cit., p. 33.

[5] Ibid., p. 74.