Routes, sauna, eau du robinet : de nouveaux marqueurs pour prédire Alzheimer
Chers amis,
Alzheimer est une maladie dramatique à tous points de vue : c’est, dans les premiers stades de la maladie, la souffrance de ne pas maîtriser la « fuite » de ses souvenirs.
C’est, pour l’entourage des patients, la douleur de voir s’éloigner, de son vivant, un être cher ; de ne plus le reconnaître tel qu’on l’a connu et aimé.
Mais ce n’est pas tout. À l’échelle de la société, c’est un fléau dont personne aujourd’hui ne parvient à freiner la progression.
À l’échelle individuelle, ça n’est pas mieux : les médicaments prescrits contre cette maladie ont le même impact qu’un placebo !
(Ou bien ont un impact, disons, inattendu : une étude publiée il y a quelques mois dans la revue Nature révèle qu’un médicament prescrit contre Alzheimer, le Tideglusib, fait… repousser les dents[1] !!!)
Qui peut prétendre « comprendre » Alzheimer ?
Les médecins savent diagnostiquer la maladie.
Les scientifiques savent comment elle endommage le cerveau et la vie de ceux qu’elle touche.
Mais nul n’a totalement compris comment et pourquoi cette forme de démence (la plus courante) touche aujourd’hui près d’une personne sur cinq âgée de plus de 75 ans en France.
La communauté scientifique, sur Alzheimer, cherche donc toujours à comprendre.
Elle rassemble des indices, mais n’a pas encore trouvé la clé de l’énigme.
Et c’est justement de ces « indices » dont j’aimerais vous parler ici : ce sont autant d’éléments associés au mode de vie et aux habitudes alimentaires qu’il peut être utile de connaître.
Aluminium : des soupçons confirmés
Le premier indice est plus une confirmation qu’une découverte. Le rôle de l’aluminium dans le développement de la maladie d’Alzheimer fait débat depuis 40 ans.
Ce métal blanc léger, que l’on trouve dans de très nombreux outils de consommation alimentaire, des cannettes aux casseroles en passant par le fameux papier qui porte son nom, est naturellement présent dans l’eau et même l’air.
Autant vous dire, donc, que l’on ingère à longueur de temps de l’aluminium, qu’on le veuille ou non ! En soi, ce n’est pas grave : nous l’évacuons naturellement par les reins.
Sauf les malades d’Alzheimer. Beaucoup d’études ont fait état de la présence d’aluminium dans le cerveau de personnes atteintes par la maladie ; cependant le lien entre cette présence inhabituelle et la pathologie restait obscur.
On pourrait appeler ça le bénéfice du doute…
Une étude parue dans le Journal of Trace Elements in Medicine and Biology[2] le lui a ôté.
Des chercheurs britanniques ont en effet effectué une mesure systématique d’aluminium dans les tissus cérébraux de douze malades.
Tous sans exception contenaient de l’aluminium dans des proportions en moyenne 10 fois supérieures aux doses considérées comme toxiques !
De façon plus accablante encore, il y avait un lien entre l’âge auquel les patients ont développé la maladie et la proportion d’aluminium. Plus les patients avaient développé Alzheimer tôt, plus leurs tissus cérébraux contenaient de l’aluminium.
Or, l’aluminium est neurotoxique ; il y a trois ans, l’un des auteurs de l’étude dont il est question ici faisait le point sur les dangers que cet élément représente pour le cerveau[3] : il perturbe la communication biochimique entre les neurones et réduit même leur longévité.
L’aluminium est également connu pour stimuler le système immunitaire. C’est la raison pour laquelle on le retrouve comme adjuvant dans un vaccin sur deux en France !
Impossible, je vous le disais, de chasser l’aluminium de notre environnement : il est partout !
En revanche, voici un argument supplémentaire pour limiter au maximum l’exposition à des produits qui en contiennent des doses très fortes : qu’il s’agisse de cosmétiques (comme certains déodorants) ou produits transformés alimentaires (il est utilisé comme colorant alimentaire, E173).
Plus on vit près d’une autoroute, plus on risque de développer Alzheimer
Le deuxième indice concerne l’explosion des cas d’Alzheimer dans les centres urbains occidentaux.
Vivre tout près d’un axe routier très emprunté est une « nouveauté » de l’espèce humaine : cela fait à peine un demi-siècle que ce fait est possible !
Des chercheurs canadiens ont voulu mesurer l’influence de cette caractéristique de civilisation sur le développement de trois maladies : Alzheimer, Parkinson et la sclérose en plaques[4].
Leur méthode est intéressante : ils ont, en 2001, sélectionné deux populations distinctes, vivant depuis cinq ans au moins (donc depuis 1996) dans l’État de l’Ontario.
La première population rassemblait 4,4 millions de personnes entre 20 et 50 ans ; pour ce groupe, c’est l’influence de la proximité d’un axe routier sur la sclérose en plaques qui était scruté.
Pour le second groupe, composé d’adultes âgés entre 55 et 85 ans (2,2 millions de personnes), c’est l’influence de cette proximité sur Alzheimer et Parkinson qui était étudiée.
Sur dix ans (jusqu’en 2012) les chercheurs ont enregistré, sur cette cohorte, 9247 diagnostics de sclérose en plaques, 31 577 de Parkinson, et 243 611 de démence. Puis, ils ont cartographié ces résultats afin de mesurer l’influence statistique du lieu de vie sur l’une ou l’autre maladie.
Conclusion : le fait de vivre à proximité d’une route à fort trafic n’augmentait ni ne réduisait les risques de développer une sclérose en plaques ou Parkinson.
En revanche un lien net a été établi pour Alzheimer : les personnes vivant près d’un axe fréquenté avaient en moyenne plus de risques de développer une forme de démence.
Le lien est net parce que cette association dépend de la proximité de la route !
Les personnes qui vivaient à moins de 50 mètres avaient un risque majoré de 7 à 11 % de développer une démence ; celles vivant entre 50 et 100 mètres, un risque accru de 4 % ; entre 100 et 200 mètres, le risque ne s’élève plus que de 2 %, et au-delà de 200 mètres, n’est plus significatif.
Impossible, à ce stade, de savoir si c’est l’exposition accrue à la pollution aux particules fines générée par le trafic routier ou le désagrément causé par le passage incessant des véhicules, ou les deux, qui est cause de cette association.
Une leçon se dégage néanmoins nettement : c’est ce que notre mode de vie contemporain a de plus déconnecté de la nature et du calme qui privilégie le développement de cette maladie neurodégénérative.
À l’inverse, certaines traditions semblent protéger de la maladie…
Le sauna contre Alzheimer !
C’est le cas de la tradition millénaire du sauna dans les pays nordiques, et tout particulièrement en Finlande.
Ainsi, des chercheurs finlandais ont remarqué chez les participants d’une étude que plus ils allaient au sauna, moindre était leur risque de développer Alzheimer.
Je dis bien « remarqué », car les chercheurs qui ont suivi durant vingt ans 2000 messieurs vivant dans l’est du pays, avaient pour objectif premier d’étudier l’influence de cette pratique culturelle sur la santé cardiaque (le sauna est en effet connu pour réduire les risques d’accidents cardiaques)[5].
Ainsi, les hommes qui prenaient un bain de sauna entre 4 et 7 fois par semaine avaient 65 % de risques en moins de développer Alzheimer que ceux qui n’en prenaient qu’un seul par semaine.
Ce chiffre paraît énorme ; et pourtant les bienfaits connus sur la santé cardiaque, d’après les auteurs de l’étude, seraient associés à ceux sur le cerveau. Sans parler de la relaxation et du bien-être procurés par le sauna.
J’imagine votre réaction : mais qui, en France, pourrait prendre un bain de sauna 4 à 7 fois par semaine ?!
Il est vrai qu’en Finlande les cabines de sauna sont extrêmement répandues ; on en trouve presque dans chaque maison familiale !
Un accès aussi facile au sauna semble plus difficile sous nos latitudes.
Cependant, tout comme l’étude précédente nous rappelait que le stress et la pollution augmentent les risques de développer Alzheimer, celle-ci nous rappelle que le calme et le repos nous aident à nous en protéger.
Marcher dans la nature, méditer, prendre un bon bain chaud, sont des activités simples qui nous permettent de nous ressourcer.
Attention à l’eau du robinet
A propos de nature, l’une des données mal connues jusqu’ici concernait le rôle des facteurs environnementaux dans l’apparition de la démence.
Des chercheurs écossais se sont penchés sur la question : parmi quelque 6665 études internationales, ils en ont sélectionné 60 leur permettant de mesurer l’influence réelle de l’exposition de chaque composant environnemental au risque de démence[1].
La liste est longue, et répartit les composants en trois familles : « strong/moderate/Weak » (influence forte, moyenne et faible). Vous pourrez, si vous le souhaitez, consulter la liste complète en ligne ici. Voici les facteurs les plus risqués pour notre santé mentale.
C’est, d’abord, la pollution atmosphérique, en particulier les oxydes d’azote (déjà responsables de l’effet de serre), l’ozone et le monoxyde de carbone. La pollution de l’air intérieure est aussi concernée : être régulièrement exposé à de la fumée de tabac est ainsi associé à une forme sévère de démence.
Parmi les métaux, notamment présents en trop grande quantité dans l’eau, le principal coupable est l’aluminium. J’en parlais au début de cette lettre.
De façon assez intéressante, d’ailleurs, sachez que c’est une étude menée dans le sud-ouest de la France qui a permis de remarquer qu’une augmentation de 0,1 mg dans l’eau du robinet bue quotidiennement double (double !!!) le risque de développer une démence !
Parmi les métaux lourds, les chercheurs ont constaté qu’une quantité importante de personnes souffrant Alzheimer étaient nées dans des aires géographiques plus concentrées en plomb que la moyenne.
Les solvants et les pesticides, herbicides et insecticides s’avèrent particulièrement associés au développement précoce de la démence.
Mais ce n’est pas tout : la carence en vitamine D et… le fait de vivre tout près de pylônes électriques !
Portez-vous bien !
Rodolphe Bacquet
[1] Promotion of natural tooth repair by small molecule GSK3 antagonists
[2] Aluminium in brain tissue in familial Alzheimer’s disease
[3] What is the risk of aluminium as a neurotoxin?
[5] Tanjaniina Laukkanen, Setor Kunutsor, Jussi Kauhanen, Jari Antero Laukkanen. Sauna bathing is inversely associated with dementia and Alzheimer’s disease in middle-aged Finnish men. Age and Ageing, December 2016 DOI: 10.1093/ageing/afw212
[6]Environmental risk factors for dementia: a systematic review
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Instructif…. pour une fois j’ai la chance de ne pas etre trop concernée par un mauvais environnement et je fais attention au reste (par contre étant donné les causes de mon stress et l’impossibilité d’y remédier j au du mal sur ce point)
Concernant la fumée le risque est il le même avec de la fumée d’insert ? (Baraque envahie de suie et centres et rien à faire contre ça hormis faire ramoner mais ça ne suffit pas et le tirage semble normal malgré les conditions architecturales de l endroit qui par ailleurs n’est pas ventilé je dois ouvrir les fenêtres mais c’est ça ou ne pas chauffer l électrique est trop cher dans les bâtiments vetustes)
Donc la fumée de foyer fermé équivaut elle a une tabagie passive ? Merci
Merci beaucoup.
Merci beaucoup.