Chers amis,
L’une des histoires les plus marquantes relatives aux zones bleues, ces régions du monde où l’on vit plus longtemps et en meilleure santé que partout ailleurs sur la planète, a été rapportée par le journaliste américain Dan Buettner en octobre 2012.
Intitulé « The Island where people forget to die » (« l’île où les gens oublient de mourir »), son reportage publié par The New York Times[1] débute par l’extraordinaire histoire de Stamatis Moraitis, un vétéran grec de la Seconde guerre mondiale.
Arrivé aux États-Unis en 1943 afin de faire soigner son bras blessé, il y resta plus de trente années, durant lesquelles il se maria, eut trois enfants, acheta une maison en Floride et une Chevrolet. Le rêve américain d’alors. Il dura jusqu’en 1976.
Stamatis Moraitis a alors 65 ans ; on lui diagnostique un cancer du poumon.
Non seulement le diagnostic est confirmé par dix (sic) médecins, mais le pronostic est désastreux : ils ne donnent guère plus de 9 mois à vivre à l’immigré grec.
Si je vous en parle aujourd’hui c’est que, vous vous en doutez, l’histoire ne s’est pas passée comme le prévoyaient les médecins.
Il retourne sur son île natale et plante des légumes
Un moment, Monsieur Moraitis envisage d’accepter les traitements agressifs contre le cancer que lui proposent ses médecins américains.
« Foutu pour foutu », se dit-il, « autant retourner sur mon île natale pour y finir mes jours ».
(Ce n’est pas seulement par romantisme : les funérailles n’y coûtent que 200 dollars, contre plusieurs milliers de dollars aux États-Unis ; il entend donc soulager ses proches du poids financier de ses obsèques.)
Le Grec condamné par ses médecins quitte donc les États-Unis et retourne sur Ikaria, la petite île de la mer Égée qui l’a vu naître, et qui le verra donc mourir.
C’est là, toujours bien vivant, qu’il rencontre le journaliste Dan Buettner, auquel il raconte son histoire en 2012.
Et que raconte-t-il ?
Que dès son arrivée, ses amis d’enfance commencèrent à venir le voir et à passer des après-midis entiers à discuter avec lui.
Qu’ils apportaient systématiquement une bouteille du vin local.
Qu’il renoua, également, avec la foi en retournant à la petite chapelle orthodoxe où son grand-père officiait autrefois.
Et qu’un jour, se sentant plus fort, il décida de planter des légumes dans son jardin.
« Il ne s’attendait pas à vivre assez longtemps pour les récolter, mais il aimait être au soleil et respirer l’air marin. Elpiniki (sa femme) pourrait profiter des légumes frais après son départ. Six mois passèrent. Moraitis ne mourut pas. Au contraire, il se mit à récolter les fruits de son jardin et, se sentant plus enhardi, il nettoya aussi le vignoble familial[2]. »
Aujourd’hui, Stamatis Moraitis est décédé.
Mais il est décédé en 2013, à l’âge de 102 ans.
Soit 37 ans après que ses médecins lui ont pronostiqué neuf mois maximum à vivre.
Médecins qui, souriait-il lorsqu’il racontait son histoire, étaient morts depuis longtemps…
Le bonheur est dans le jardinage
La raison pour laquelle Buettner débute son reportage à Ikaria par l’histoire de cet homme est évidente : elle frappe l’imaginaire.
Un malade du cancer, condamné par la médecine allopathique, qui s’offre non seulement le luxe de guérir sans traitement dûment approuvé par ses cancérologues, mais dépasse les 100 ans sur une petite île au mode de vie rustique !
Non seulement l’histoire de Stamatis Moraitis apparaît comme la démonstration des bienfaits du régime méditerranéen, mais elle rassemble toutes les « leçons » des zones bleues parmi lesquelles, à l’époque, Ikaria venait de faire son entrée : l’aspect social, le profil nutritionnel, le dimension spirituelle et… le côté jardin !
Je vous en parle régulièrement lorsque j’aborde les zones bleues : l’activité physique est l’un des ingrédients-clé de la recette de longévité des centenaires en pleine forme.
Mais, attention, pas une activité physique intensive, au contraire : une activité physique douce, régulière, et adaptée.
Et, parmi les 5 zones bleues, l’activité la plus pratiquée qui rassemble toutes ces dimensions est le jardinage.
Monsieur Moraitis et ses légumes qu’il ne pensait pas avoir l’heur de goûter au moment où il les plantait, au milieu des années 1970 : je m’en suis souvenu en lisant une étude scientifique publiée dans le Journal of Population Ageing intitulée « Blue Zones : Centenarian Modes of Physical Activity : A Scoping Review » (« Zones bleues : les types d’activité physique des centenaires : une étude de portée »)[3].
Fondée sur plusieurs dizaines de publications scientifiques consacrées aux zones bleues, « la synthèse des données a révélé que 81 % des activités pratiquées par les centenaires de la zone bleue sont des activités d’intensité modérée. […] Le mode le plus prédominant représenté dans les études incluses était les activités agricoles. Dans l’ensemble, les centenaires des zones bleues sont très actifs, effectuent des mouvements continus et réguliers au quotidien, conservent des loisirs quotidiens et travaillent au-delà de l’âge prévu de la retraite. »
Comme souvent, les scientifiques ont redécouvert, ou tout simplement vérifié protocolairement, ce que le bon sens vous a sûrement déjà montré, à savoir que s’occuper de son jardin est une façon simple d’être en contact avec la nature et de s’exposer au soleil, de produire soi-même une nourriture saine, et de pratiquer une activité physique douce.
Jardiner pour le corps et l’esprit
Le jardinage est en effet bien plus qu’un loisir ou une activité de plein air.
Ses bienfaits sont bien documentés :
- Sur la santé physique : bêcher, planter et récolter mobilise les muscles, améliore la circulation et renforce le système cardiovasculaire. Ce travail modéré mais constant s’apparente à l’exercice physique régulier recommandé par tout médecin sensé.
- Sur la santé mentale : le contact direct avec la terre et les plantes réduit le stress et améliore le bien-être général. Des chercheurs ont même montré qu’une bactérie présente dans le sol, Mycobacteirum vaccae, stimule la production de sérotonine, cette hormone du bonheur[4].
Cultiver votre propre potager ne se limite donc pas à produire des fruits et légumes savoureux ; ça alimente aussi un sentiment de fierté et d’autosuffisance.
Comme sur l’île d’Ikaria, où les habitants mangent principalement ce qu’ils cultivent eux-mêmes, le jardinage encourage une alimentation saine, riche en légumes frais et en nutriments essentiels, et dépourvue d’intrants chimiques.
Dans notre monde où tout doit aller vite, le jardinage vous apprend à ralentir.
Je n’ai malheureusement pas de jardin. En revanche, je fais pousser quelques plantes sur mon balcon et je confesse éprouver un plaisir enfantin à faire germer… des noyaux d’avocat !
Pas du grand jardinage, je vous l’accorde, mais simplement planter une graine, attendre qu’elle germe, puis qu’elle donne un fruit ou une fleur, c’est retrouver le rythme naturel de la vie.
Portez-vous bien,
Rodolphe Bacquet
[1] https://www.nytimes.com/2012/10/28/magazine/the-island-where-people-forget-to-die.html – Dan Buettner, « The Island where People Forget to Die », in. The New York Times, 24 octobre 2012
[2] Ibid.
[3] https://link.springer.com/article/10.1007/s12062-022-09396-0 – Casandre Herbert, Mary House, Ryan Dietzman et al., « Blue Zones : Centenarian Modes of Physical Activity : a Scoping Review », in. Journal of Population Ageing, 19 octobre 2022
[4] https://ecotree.green/blog/mycobacterium-vaccae-une-bacterie-presente-dans-les-sols-forestiers-fait-notre-bonheur – « Mycobaterium vaccae : une bactérie présente dans les sols forestiers fait notre bonheur ! », in. Ecotree Green, 10 février 2021
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Bonjour ,
Afin de voir par moi même ce qu´il se passait vraiment sur Ikaria et parce que j´adore la Grèce et ses habitants et parce ce que je suis passionné de vie en bonne santé , je suis allé habiter sur cette île où vivent 8000 habitants et 60.000 chèvres.
Alors , je peux vous dire que vous ne pourrez jamais vivre à l´identique dans nos sociétés modernes et hyper stressées.
Se lever le matin , déjeuner au soleil sur sa terrasse face à la mer égée , sentir le parfum des plantes butinées par les abeilles ….
Bref , je comprends pourquoi cette personne c´est rétablie.
C´est un ensemble de choses qui caractérise ces zones bleues et vous ne les retrouvez pas chez nous .
Désolé , mais c´est du vent ….
Amicalement
Roger