Chers amis,

Si vous suivez un minimum cette lettre, vous savez déjà à quel point l’activité physique joue un rôle capital dans la longévité en bonne santé.

Mais il y a activité physique et activité physique.

« Un club de torture banal »

« Activité physique » ne signifie pas se faire du mal, c’est-à-dire que rien ne vous oblige à prendre un abonnement à une salle de sport qui sent la sueur, fréquentée par des warriors acharnés et outrageusement musclés qui vous décourageront d’avance ; le genre d’endroits que l’écrivain Didier van Cauwelaert décrit ainsi dans l’un de ses romans :

« C’était un club de torture banal, où des gens ruisselaient en courant sur des tapis roulants sans avancer d’un mètre, tandis que d’autres grimaçaient obstinément pour tenter de repousser des blocs de fonte. [1] ».

En réalité, les centenaires en pleine forme des zones bleues nous enseignent que l’activité physique qui fait la différence est celle que l’on pratique à petites doses, au quotidien.

Autrement dit, le sport de haute intensité, c’est très bien si vous aimez cela et que c’est pour vous un facteur de réalisation ; pour des bienfaits à long terme, ce qui compte, c’est une activité physique

  • Douce ;
  • naturelle (qui n’exige pas de vous des efforts surhumains) ;
  • adaptée à vos capacités (et donc progressive) ;
  • inscrite dans la routine.

L’activité physique des centenaires des zones bleues, c’est par exemple, pour les bergers sardes de la Barbagia, la marche en montagne avec les troupeaux ; pour les Okinawaïens, se rendre à vélo chez leurs amis ou s’occuper de leur jardin.

Vous pouvez faire la même chose : nul besoin de matériel ou d’endroit spécial ; encore moins de recherche de performance.

Cela commence avec… des escaliers.

Avancer à l’horizontale, c’est bien, avancer à la verticale, c’est encore mieux !

Les escaliers, ça paraît le degré zéro de l’activité physique.

Pourtant, prendre régulièrement les escaliers plutôt que l’ascenseur, si vous habitez un immeuble, fait déjà une différence significative au bout de quelques semaines en termes de souffle, de rythme cardiaque et même de poids.

Ainsi, une femme de 45 ans, pesant 75 kg, qui utilise les escaliers dans le métro, puis les escaliers sur son lieu de travail jusqu’au 5e étage, deux fois par jour, va brûler plus de 17 000 calories supplémentaires par an, ce qui équivaut à plus de huit jours d’alimentation.

Cette habitude physique s’inscrit donc dans une hygiène de vie globale qui réduit le risque de maladies cardiaques, d’AVC, de cancer et de diabète de type 2 : une étude de Harvard a prouvé que, si vous montez en moyenne au minimum huit marches d’escalier par jour en courant, votre taux de mortalité est inférieur de 33 % aux personnes sédentaires qui ne montent aucune marche par jour [2].

Le nombre de marches et l’âge du capitaine

Monter des marches permettrait en outre de conserver un cerveau jeune, d’après une étude de l’université Concordia, à Montréal.

L’étude observe que plus on monte de marches, plus le niveau de matière grise, signe de la jeunesse du cerveau, est important. Les chercheurs ont en effet découvert que l’âge du cerveau diminue de 0,58 an pour chaque volée d’escalier grimpée quotidiennement [3] !

Et si vous habitez une maison avec étage, et que vous avez déjà des marches à monter… songez à les prendre en courant !

Oui, en courant.

En marchant ou en courant sur sol plat, votre corps se déplace sur un plan horizontal.

En revanche, en vous déplaçant dans les escaliers, vos muscles sont obligés de résister à la gravité et de se déplacer sur un plan vertical.

Et ça fait toute la différence !

Ça va mieux en les courant

Monter les marches en courant renforce vos muscles, votre coordination, votre équilibre et agit sur votre endurance musculaire. Les principaux muscles en action sont :

  • les muscles quadriceps et les fessiers: vous devez monter les genoux à hauteur de hanche et engager la propulsion avec les fessiers.
  • les mollets: vous poussez sur l’avant du pied ou partie « médio-pied » pour vous propulser et rebondir sur les marches.
  • la sangle abdominale: la foulée n’est pas uniquement une question de jambes. Elle implique également d’utiliser le moteur vertébral. Votre bassin et vos épaules vont effectuer une rotation horizontale en opposition de phase, ce qui va générer une torsion de la colonne vertébrale et donc une activation de la sangle abdominale. Ce phénomène est encore plus visible dès lors que la vitesse de course est élevée (lors d’un sprint par exemple).

Une meilleure santé cardiovasculaire

Une étude menée en 2000, publiée dans Preventive Medecine, a suivi l’état de santé de 22 étudiantes universitaires sédentaires qui, pendant 7 semaines, s’entraînaient à monter des escaliers de façon progressive.

Au terme de l’étude, les chercheurs ont constaté qu’à l’exercice leurs fréquences cardiaques étaient devenues plus basses, ainsi que leurs taux d’oxygène et leur concentration de lactate dans le sang (molécule qui transporte de l’énergie entre les cellules du muscle).

Autre bienfait qui a son importance : leur taux de HDL (le « bon » cholestérol) avait augmenté [4].

La peur de tomber

Évidemment, il s’agit d’y aller progressivement, surtout si vous êtes âgé et avez peur de tomber – et de vous casser quelque chose.

Si vous avez déjà les os très fragiles, ne prenez pas de risque inutile.

Marcher vite, puis courir dans les escaliers oblige à se caler sur les marches. Cette contrainte exige une vraie technique qui peut être difficile à maîtriser au début mais qui peut être vite assimilée avec de la régularité.

D’où l’intérêt de pratiquer cet exercice chez soi, ou à tout le moins dans un escalier que l’on connaît bien.

Cet escalier deviendra le meilleur allié santé de votre maison !

Portez-vous bien,

Rodolphe Bacquet

[1] Didier van Cauwelaert, Le principe de Pauline, Albin Michel, 2014, p.117

[2] Paffenbarger RS Jr, Wing AL, Hyde RT. Physical activity as an index of heart attack risk in college alumni. Am J Epidemiol. 1978 Sep;108(3):161-75.

[3] Steffener J, Habeck C, O’Shea D, Razlighi Q, Bherer L, Stern Y. Differences between chronological and brain age are related to education and self-reported physical activity. Neurobiol Aging. 2016 Apr;40:138-44.

[4] Boreham CA, Wallace WF, Nevill A. Training effects of accumulated daily stair-climbing exercise in previously sedentary young women. Prev Med. 2000 Apr;30(4):277-81.