Chers amis,

Comme vous peut-être, je suis encore sous le choc des annonces faites par Jean Castex hier soir[1].

La transformation du pass sanitaire en pass vaccinal était sur la table depuis un moment – malgré les dénégations du ministre de la santé le 25 novembre dernier[2].

Car 3 semaines seulement séparent ces deux annonces gouvernementales officielles : 

Pour quiconque a compris la méthode de communication de ce gouvernement qui, depuis le début de la crise sanitaire, a – entre autres – juré que le masque ne servait à rien, ou que le pass sanitaire ne serait pas prolongé au-delà du 15 novembre, avant à chaque fois de se dédire quelques semaines plus tard, ce retournement de veste n’est pas une surprise.

Il reflète et confirme celui du chef de l’État lui-même qui, le 24 novembre 2020, promettait : « je ne rendrai pas la vaccination obligatoire »[3]… pour finalement annoncer cette semaine sur TF1 que « nous sommes quasiment à l’obligation vaccinale »[4].

La question à laquelle il importe de répondre, ça n’est donc pas « pourquoi le gouvernement fait-il le contraire de ce qu’il annonçait ? » mais « pourquoi le fait-il maintenant ? » 

Omicron accélère l’agenda vaccinal du gouvernement

La réponse semble simple : Omicron.

Mais il faut la préciser.

Car dans la communication du gouvernement français, comme d’ailleurs dans celle du gouvernement britannique, Omicron n’est qu’un prétexte.

C’est le « raz-de-marée » d’Omicron qui justifie les nouvelles restrictions de part et d’autre de la Manche, et ce alors même qu’on ne comptait officiellement en France, hier, que 310 infectés[5].

Pourquoi Boris Johnson a-t-il, lui, sonné le tocsin suite à un seul décès attribué à Omicron… alors que les décès attribués à Delta se comptent par dizaines chaque jour en Angleterre depuis plusieurs semaines ?

On voit en effet sur ce graphique (source : worldometers[6]) qu’après la vague du printemps 2020 puis celle de l’hiver 2020-2021, il n’y a pas de pic de décès en Grande-Bretagne mais une courbe régulière.

Pourquoi, donc, la mort d’un seul patient positif à Omicron se traduit-il par ce branle-bas de combat vaccinal ?

Réponse : la contagiosité d’Omicron, effectivement plus forte que tous les variants précédents.

Or, cette contagiosité, qui sert de prétexte aux gouvernements pour durcir encore leurs restrictions, s’accompagne d’une moindre dangerosité, et d’une moindre létalité.

Je vous en ai parlé dans une lettre début décembre, ces paramètres – une plus grande contagiosité associée à une plus faible dangerosité – constituent une « réussite » pour un virus : il se répand d’autant plus vite et plus efficacement qu’il ne tue pas ses hôtes.

C’est ce qui m’avait fait vous écrire début décembre que la suprématie d’Omicron sur Delta pourrait en réalité être une bonne nouvelle car nous avons, collectivement, plus intérêt à être infectés par un virus courant et bénin, qui nous fera développer des anticorps à peu de frais (si j’ose m’exprimer ainsi) que par un virus plus rare, mais plus dangereux.

Et c’est là que le nouveau variant prend de vitesse le gouvernement.

Course de vitesse entre l’immunité naturelle et l’immunité acquise

Après l’évitement viral (confinement, geste barrière), le développement d’une immunité collective est, depuis un an, la réponse de sortie de crise recherchée par les gouvernements.

Mais cette immunité collective semble devoir être, pour des raisons économiques évidentes, d’origine artificielle, c’est-à-dire vaccinale.

Le fait que les vaccins actuellement utilisés n’empêchent ni l’infection ni la transmission ne changent hélas rien à l’affaire.

La rapidité d’Omicron prend donc de court les gouvernements à deux titres.

Le premier, c’est évidemment l’échappement immunitaire vaccinal : deux doses de Pfizer/BioNTech ne protégeraient qu’à hauteur de 33 % d’Omicron ; une triple dose à 70%, 14 jours après l’injection[7].

Le second, c’est que si Omicron se répand en effet plus rapidement que tout autre variant, et d’autant plus qu’il échappe à la protection censée être apportée par le vaccin, l’immunité collective risque d’être atteinte plus vite naturellement, qu’artificiellement !

Le gouvernement se voit donc contraint de vacciner encore plus vite et encore plus fort afin :

  • De pouvoir prétendre « contenir » la vague de morts d’Omicron ;
  • De pouvoir prétendre que l’immunité collective a été gagnée grâce à la campagne vaccinale… et non, en réalité, grâce à l’immunité naturelle développée par les infections à Omicron.

Car des morts d’Omicron, il y en aura, c’est évident : mais il y en aura, proportionnellement aux cas positifs, beaucoup moins que lors des précédentes vagues.

En essayant de « rattraper » Omicron, les gouvernements pourraient donc :

  • Attribuer aux vaccins le bénéfice de la moindre proportion cas positifs/décès, en réalité due à l’évolution naturelle du virus;
  • Justifier, ce faisant, le principe d’une vaccination régulière tous les 4 à 6 mois pour « protéger » la population.

L’enjeu, on le voit, consiste pour les gouvernements et les industriels non seulement à ne pas perdre la face (afin que la faible efficacité de ces vaccins, présentés comme solution unique, ne soit pas trop visible) mais surtout à ne pas perdre la manne que constitue un rappel vaccinal tous les 6 mois – ramené d’ailleurs à 4 mois par Jean Castex.

C’est, selon moi, la raison profonde de l’accélération du calendrier de l’application du pass vaccinal, en projet depuis un moment déjà.

La transformation du pass sanitaire en pass vaccinal n’est pas une surprise : c’est son application précipitée qui est le signal que la stratégie vaccinale est au pied du mur.

Le pass vaccinal ne sera pas créé pour faire de la figuration

Depuis plus d’un an, les gouvernements avancent par étapes :

  • D’abord la vaccination sur le mode du volontariat ;
  • Ensuite « l’incitation » à la vaccination par un pass sanitaire annoncé comme provisoire ;
  • L’installation dans le temps, et les esprits, de ce pass sanitaire ;
  • Le conditionnement de ce pass sanitaire à une troisième dose ;
  • La transformation du pass sanitaire en pass vaccinal, rendant de facto obligatoire la vaccination pour de ne pas devenir un citoyen déclassé. 

Tout cela évidemment contrevient au règlement européen du 14 juin 2021 sur le pass sanitaire qui interdit expressément que ce dernier aboutisse à une discrimination entre les vaccinés et les non-vaccinés[8].

Mais Ursula van der Leyen s’étant elle-même déclarée favorable à l’ouverture du débat sur l’obligation vaccinale… la France ne fait vraisemblablement que prendre les devants.

Nous pouvons donc tout à fait imaginer les prochaines étapes comme suit :

  • La validité du pass vaccinal sera conditionnée par une dose de rappel tous les 4 à 6 mois ;
  • Le pass vaccinal sera ultérieurement « ouvert » à d’autres vaccins que ceux contre le covid, p.ex. aux trois vaccins obligatoires si vous êtes né avant 2018, aux onze vaccins obligatoires su vous êtes né après 2018.

Autrement dit, l’accès aux salles de spectacle, restaurants, bientôt sans doute aux transports publics, qui dépend avec le pass vaccinal de la preuve de votre vaccination anti-Covid, pourra s’élargir, en fonction de votre année de naissance, à la preuve d’autres vaccinations.

Un « bon » citoyen sera par conséquent avant tout un patient à jour de ses vaccins obligatoires.

Et nous assistons, en direct, à la naissance de cette société qui discrimine ses citoyens en fonction de leur statut vaccinal.

Cela peut vous paraître de la science-fiction, mais l’instauration en France d’un « pass vaccinal » il y a seulement un an ne vous aurait-elle pas paru de la science-fiction ?

Il nous appartient encore je pense, d’éviter ce scénario : le projet de loi sur la transformation du pass sanitaire en pass vaccinal n’est pas encore voté.

Il sera déposé à l’Assemblée nationale durant la première semaine de janvier.

Voici venu le moment de nous demander ce que nous pouvons faire d’ici-là… en fonction du modèle de société que nous voulons.

Portez-vous bien,

Rodolphe Bacquet

[1] https://www.lemonde.fr/planete/live/2021/12/17/covid-19-suivez-la-declaration-de-jean-castex-apres-le-conseil-de-defense-sanitaire_6106548_3244.html

[2] https://twitter.com/BFMTV/status/1463844883697967106

[3] https://www.youtube.com/watch?v=boqEam6y6Jg

[4] https://www.lci.fr/sante/video-emmanuel-macron-sur-tf1-et-lci-covid-19-nous-sommes-quasiment-a-l-obligation-vaccinale-contre-le-coronavirus-2204694.html

[5] https://www.linternaute.com/actualite/guide-vie-quotidienne/2588419-variant-omicron-nombre-de-cas-en-hausse-en-france-une-meilleure-connaissance-du-mutant/

[6] https://www.worldometers.info/coronavirus/country/uk/

[7] https://www.franceinter.fr/societe/le-pfizer-seulement-efficace-a-33-contre-les-infections-omicron-cinq-questions-sur-un-chiffre-frappant

[8] https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32021R0953&from=EN