(moi oui)
Chers amis,
J’ai entendu cette histoire authentique à la radio :
« Une religieuse était restée cloîtrée pendant une trentaine d’années, retirée dans un couvent. Un jour, elle est sortie et a réintégré la communauté humaine. On lui a demandé ce qui l’avait le plus étonnée dans l’évolution de la société. On s’attendait à ce qu’elle parle de la forme des voitures, des immeubles, de l’apparition des ordinateurs, des téléphones portables. « Non, a-t-elle répondu, ce qui a changé, c’est que les gens ne sifflent plus dans la rue[1]. » »
Ça m’a frappé.
Car c’est vrai, les gens ne sifflent plus.
La principale raison est évidente : au moins une personne sur deux porte un casque sur les oreilles dans la rue. Récemment les « airpods », ces écouteurs sans fil, ont fait leur apparition (soupçonnés d’être cancérogènes[2], mais c’est une autre histoire).
Donc la musique est désormais dans les iPod et les téléphones, elle n’est plus dans notre tête.
Je vous le dis avec d’autant plus de regrets que je suis moi-même… un siffleur !
Sifflez, et on vous regardera de travers
Je suis amoureux de la musique mais je ne suis pas musicien. Par contre, je chantonne beaucoup et je siffle énormément.
Je suppose que c’est ma façon à moi de m’approprier les mélodies que j’aime, parce que je ne joue d’aucun instrument.
J’ai ma propre « playlist » préférée, avec des airs qui me reviennent sur les lèvres sans que j’y pense :
- l’air de Pierre dans Pierre et le loup, de Prokofiev ;
- le thème du film de James Bond, Vivre et laisser mourir;
- l’ouverture de L’Arlésienne, de Georges Bizet ;
- la mélodie des Remparts de Varsovie, une chanson de Jacques Brel ;
- etc.
Mais il est vrai que je siffle un peu moins qu’avant : j’ai remarqué que si je me mets à siffler dans un lieu public, les gens se mettent à me regarder. Comme si j’étais fou.
Et moi-même je n’entends quasiment plus personne siffler dans la rue.
Siffler en travaillant…
Le cinéma compte des siffleurs très célèbres. Vous remarquerez qu’il s’agit toujours de vieux films. Les gens ne sifflent plus non plus dans les films d’aujourd’hui !
Il y a Blanche-Neige et les sept nains. Il y a les prisonniers britanniques du Pont de la rivière Kwaï.
Mais avez-vous remarqué une chose ?
Quand Blanche-Neige siffle, c’est quand elle entreprend de nettoyer et ranger le gigantesque capharnaüm qui règne chez les nains. C’est une tâche titanesque, qu’elle décide d’accomplir en sifflant – la chanson s’intitule d’ailleurs « Siffler en travaillant » [3].
Dans le même film, c’est quand les nains suent sang et eau en travaillant à la pioche dans leur mine, puis quand ils en rentrent, qu’ils sifflent et chantent[4].
Dans Le Pont de la rivière Kwaï, des soldats britanniques, prisonniers de guerre des Japonais, sont forcés par leurs geôliers de construire un pont sur un emplacement stratégique en un temps record. Ce travail imposé ressort à la fois de l’esclavage et de la torture… mais ils le font en sifflant, pour rester soudés et montrer la résistance de leur mental à l’ennemi[5].
Dans tous ces cas, siffler permet de mieux faire « passer la pilule » d’une tâche ardue, pénible.
Cela allège l’esprit de la peine physique qu’éprouve le corps.
« Siffler pour ne pas vieillir »
La science et la médecine confirment cet effet « allégeant » du sifflement, dont l’actrice Micheline Dax, vous le savez peut-être, avait fait sa spécialité.
Le Dr Frédéric Saldmann fait une leçon de bien-être du sifflement :
« Le sifflement se situe dans une fréquence entre 1 et 2,5 kHz, où l’oreille est le plus sensible. (…) Siffler en allant travailler, sous sa douche ou en se regardant dans le miroir le matin fait un bien fou au corps et à l’esprit. Il suffit de trente secondes pour que les bienfaits se produisent. Vous émettez un son qui stimule votre cerveau en envoyant un signal de joie sur une fréquence déclic : vous déclenchez une vague de bien-être pour commencer la journée du bon pied[6]. (…) »
Ce n’est pas tout.
Siffler est un petit exercice aux vertus anti-âge :
« Quand vous sifflez, vous effectuez une cure de rajeunissement pour le visage. Les muscles autour des lèvres travaillent et se mobilisent. (…) Le sifflement permet de réaliser chaque matin un fitness des muscles buccaux pour éviter l’affaissement qui se produit avec les années, faute d’exercice. Le sifflement fait également travailler le souffle et la respiration et oblige à bien respirer. Le simple fait de prendre de bonnes respirations produit un sentiment de bien-être[7]. »
Le Dr Saldmann évoque également « une grande étude scientifique en cours pour rechercher ses effets sur la mémoire et son effet potentiel de diminution des douleurs perçues. Il est fort possible que le fait de siffler une petite chanson sous la douche libère de petites quantités d’endorphines, excellentes pour la santé. »
Je n’ai pas réussi à retrouver la trace de cette étude qu’évoquait le Dr Saldmann en 2017. Mais les résultats me paraissent prévisibles, tant on trouve de témoignages sur les effets positifs du sifflement contre le stress[8].
J’avais dans le temps une collègue qui me demandait, mi-amusée, mi-énervée, d’arrêter de siffler à chaque fois que je passais non loin d’elle.
Cette malheureuse a fini en burn-out. Je me dis qu’elle aurait dû s’autoriser à siffler de temps en temps…
Si vous-même vous sifflez, écrivez-le moi en cliquant ici.
Portez-vous bien,
Rodolphe Bacquet
[1] François Morel, Je veux être futile à la France : Chroniques 2011-2013, éditions Denoël, 2013, chronique du 7 décembre 2012.
[2] Pagella (C.), « Faut-il jeter les AirPods ? », L’Illustré, avril 2019, consulté en décembre 2019, disponible sur https://www.illustre.ch/magazine/fautil-jeter-airpods
[3] « Siffler en travaillant », Blanche Neige et les Sept Nains, Disney, YouTube, disponible sur https://www.youtube.com/watch?v=YHU4fXw3a_U
[4] « Heigh-ho ! », Blanche Neige et les Sept Nains, Disney, YouTube, disponible sur https://www.youtube.com/watch?v=A70xUvyPA_c
[5] « Hello le soleil brille », Le Pont de la rivière Kwaï, YouTube, disponible sur https://www.dailymotion.com/video/xepd7z
[6] Saldmann (F.), Votre santé sans risque, Éditions Albin Michel, février 2017, p. 123.
[7] Ibid., p. 124.
[8] Schachter (H.), « To relieve stress, just start whistling », The Globe and Mail, mai 2013, consulté en décembre 2019, disponible sur https://www.theglobeandmail.com/report-on-business/careers/career-advice/life-at-work/to-relieve-stress-just-start-whistling/article12270189/
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Répondre à Yves Annuler la réponse
En soumettant mon commentaire, je reconnais avoir connaissance du fait que Total Santé SA pourra l’utiliser à des fins commerciales et l’accepte expressément.
… Coucou !!!! je fais partie de ces personnes qui sifflent encore …. en marchant, en cuisinant, …. et « on » me l’a fait remarquer … car c’est plutôt rare, surtout de la part d’une femme, quelque peu « dinosaure » sans doute …… !
Bonjour Rodolphe
Merci pour ce message,
Moi aussi je siffle tout le temps, sur mes chantiers (je suis artisan), chez moi, et tout le long de la journée
Quand je me rend chez mes fournisseurs certains me font la remarque que j’ai toujours le sourire !
Sûrement un des effets heureux du sifflement
Mes parents et sœurs me faisaient la remarque aussi…
Belle journée
Bonjour Rodolphe
Lorsque je suis en pleine nature, ou quand les fenêtres sont ouvertes tôt le matin, je siffle pour parler avec les oiseaux. Mais pas autrement ou rarement. Alors ton message me ravit.
Le chat sur les genoux, en te lisant, j’ai entonné un petit air de chant d’oiseau, celui du « crooner » de la forêt, le pinson des arbres. https://www.youtube.com/watch?v=fa5m09N6Bv4
Ahrrr, le chat Maestro n’a pas aimé du tout. Il m’a toisée et mordue aussitôt. Je lui ai dit : « tu n’aimes pas ? Moi, j’aime ! » ET…. il a décampé. J’ai continué et il serait bien revenu à la charge.
A bientôt, Guylaine de Nantes
Bonjour Rodolphe,
Merci pour ce témoignage rassurant. Je ne suis donc pas folle et je crois bien vieillir ! Ce dimanche matin, je pars marcher en forêt…et en sifflant 😉 Bon dimanche
J’ai 70 ans aujourd’hui. Enfant je rentrais de l’école en sifflotant allègrement comme mon père. Une tante m’a vue et elle a téléphoné à mes parents qui m’ont morigénée car “ cela ne se faisait pas pour une petite jeune fille, c’était mal élevé et vraiment défendu “!!!!
Bonjour, mon fils de 6 ans siffle tout le temps. Mais je trouvais ça difficile à supporter au quotidien, très bruyant à l intérieur, je l ai seulement autorisé à siffler dehors. Votre article m à fait du bien et prendre conscience que C est plutôt une bonne chose.
Merci pour votre article.
Alors je dois être un être en voie de disparition. Car je chantonne et je siffle en faisant le ménage comme Blanche-Neige. Il m’arrive également de chantonner dans la rue même sous le masque. Le printemps donne des signes d’apparition ( arbres qui bourgeonnent – oiseaux qui chantent). Mais je prends des cours de chant et de piano et je chante dans un conservatoire. Je ne conçois pas la vie sans musique. Elle remplis ma vie de retraitée de 75 ans. Merci pour vos messages qui sont du baume sur nos soucis.
Ahah, excellente remarque, qui me fait sourire.
Vous avez raison, c’est un fait rare aujourd’hui d’entendre les gens siffler dans la rue.
Mon père était un siffleur, il chantait d’ailleurs aussi très bien. Mon petit ami est un siffleur, ce qui amuse ma voisine quand il vient me voir. Je suis moi-même une « chantonneuse ».
J’ai toujours dans la tête un air qui tourne, que je chantonne ou que je « ronronne ». Ça énerve parfois les gens, mais aussi ça les fait sourire. Certains disent que je ne suis plus là, plus présente, d’autres accueillent cet état avec plus de complaisance.
À vrai dire j’ai un air pour chaque état émotionnel. Je peux m’en servir pour être dans ma tour d’ivoire, mais il peut aussi être le témoin de mon bien-être intérieur.
De toute façon je n’y peux rien, c’est.
Moi aussi je ne comprenais pas mon collègue en dépression qui soufflait quand il traversait l atelier de production trop bruyant. Maintenant 5 ans que je le remplace et moi aussi débordé de travail, déçu par le fonctionnement de l entreprise, je siffle pour me donner du courage à faire un travail qui ne me convient plus . C est de l autosuggestion de bonheur alors que j ai envie de pleurer. J avoue siffler fait du bien.
Merci pour ce post, enfant je sifflait beaucoup et la vie d’adulTe nous embarque dans un flow incessant d’informations. Je vais siffler aujourd’hui !
Bonjour,
J’ai 73 ans, j’ai toujours sifflé dans les couloirs etc : mes collègues savaient toujours quand j’arrivais ;-)
Je sifflais en montant les trois étages d’escalier, d’un seul coup sans stopper de siffler (truc : je sais siffler en expirant mais aussi en inspirant, sans transition)..
Mon voisin d’en face (40m, nous sommes à la campagne) me dit qu’il sait toujours quand je sors travailler au jardin ;-)
Bonne journée, merci pour vos réflexions et informations.
Alain
Je siffle mieux que je ne chante c est peut être pour ça que je siffle😚
bonjour, j’ai, comme d’habitude , lu avec intérêt .Il y a déjà quelque temps, Je me suis aperçu que je ne pouvais plus siffler, en cherchant à discuter avec des oiseaux comme je le faisais dans le temps. C’est la situation physique de ma bouche qui en est responsable. Mème la modulation de son est difficile. Il est vrai que ce 5 avril j’aurais mes 77 ans. Je suis né dans un lebensborn à Berlin en 1945 ; Je suis en ALD diabète . Les médicaments n’y son pas pour rien. En mai 1964 ,sur une réforme à Béguin, j’ai refusé le serment d’Hypocrite , proposé après des étude militaire . La seule injection que je peux accepter, est une injection létale !!!
JCM
Vous avez tout à fait raison, rares sont ceux qui sifflent de nos jours. J’ai longtemps travaillé avec mon père et sur le chantier tout le monde ou presque sifflait, moi y compris. Aujourd’hui on n’entend plus que des postes radio diffuser une cacophonie insupportable.
J’ai très largement passé l’âge de prendre ma retraite mais je continue et je siffle toujours.
C’est une ode au miracle de la vie et je crois bien que je la finirai en sifflant.
Je suis musicien amateur et mes professeurs m’ont toujours conseillé de chanter et, comme j’ai du mal avec le chant, de siffler. Depuis le début de la mascarade j’ai du plaisir à siffler dans la rue, ce que je ne faisais jamais auparavant, car cela me donne l’impression d’être libre et heureux, bien évidemment sans masque. C’est aussi une façon d’affirmer ma joyeuse résistance.