Chers amis,
Peut-être irez-vous à la montagne en août. Au moins pour prendre le frais !
Certains d’entre vous ne pourront pas le faire car ils ont peur du vide, comme 28% de la population, selon les statistiques .
La peur du vide est innée ; elle serait apparue il y a des milliers d’années et aurait contribué à la survie de l’espèce humaine en nous protégeant du risque de chutes, disent les chercheurs.
Elle se serait ensuite ancrée dans notre mémoire génétique, comme pour les animaux dangereux (la peur des serpents remonterait à 6 millions d’années ! )
Mais beaucoup d’idées reçues subsistent sur la peur du vide.
La différence entre vertige et peur du vide
Pour éviter d’avoir à traverser une passerelle en verre, les phobiques disent : « Je ne peux pas, j’ai le vertige ! ».
Eh bien vertige et peur du vide, ce n’est pas la même chose.
Le vertige est un effet physiologique : la sensation de rotation de votre environnement, un ressenti effectif de « tête qui tourne ».
Il peut être causé par un mauvais fonctionnement de l’oreille interne (y compris après une grosse otite), par une atteinte neurologique… ou simplement en vous levant trop précipitamment de votre fauteuil.
La peur du vide, elle, est un problème psychologique.
C’est elle, et non le vertige, qui vous paralyse à l’idée de traverser la passerelle en verre.
« Intolérant visuel à la hauteur »
Le problème est le suivant : comment expliquer que vous puissiez avoir peur même s’il n’y a pas de danger objectif, par exemple quand une barrière de protection vous sépare efficacement du vide ?
Des chercheurs américains parlent d’ « intolérance visuelle à la hauteur »,
Selon eux, c’est de cette intolérance-là que souffriraient la majorité des personnes ayant peur du vide . Les femmes de plus de 50 ans seraient particulièrement concernées.
En fait nous serions trop dépendants de notre vision pour nous orienter dans l’espace , au détriment d’autres informations spatiales fournies par l’ouïe, le toucher (la sensation d’avoir les pieds fermement ancrés sur le sol), l’oreille interne (la sensation d’être en équilibre).
Pour simplifier, si vous êtes « intolérant visuel à la hauteur » et que vous vous trouvez en haut d’une tour :
– Vos pieds et votre oreille interne vous disent « Tout va bien, le sol est ferme, tu es en équilibre. »
– Vos yeux vous crient « Alerte ! Alerte ! Tu es trop haut, tu vas bientôt tomber et tu vas mourir ! »
Pour résoudre cette tension, votre cerveau aura tendance à privilégier la « version » des yeux : « Jusqu’ici tout va bien, mais tu pourrais tomber et mourir ».
Le phénomène d’« intolérance visuelle » explique cette curieuse impression qu’ont certaines personnes d’être « attirées par le vide » comme si elles allaient s’y jeter volontairement !
L’acrophobie, quand même les escaliers vous font peur
« L’acrophobie » est le terme scientifique qui définit la peur panique du vide et des hauteurs.
Au sens clinique du terme, cette forme extrême ne toucherait que 2 à 5% de la population et deux fois plus les femmes que les hommes .
Mais c’est une forme irrationnelle, obsédante, pouvant susciter des crises d’angoisse terribles.
Sur Internet, on peut lire des témoignages d’acrophobes qui ne parviennent pas à prendre les escaliers pour monter au 4e étage d’un immeuble.
Certains doivent refuser un emploi parce qu’ils savent qu’ils devront prendre un ascenseur transparent par exemple.
D’autres sont incapables d’entrer dans une église parce que le plafond est trop haut !
C’est très handicapant.
Beaucoup de ces personnes :
– Ont été traumatisées suite à une chute ;
– Ont assisté à la chute d’une personne ;
– Ont eu une crise d’angoisse en se trouvant dans un lieu élevé ;
– Ont des facteurs héréditaires : vous avez plus de risque d’être acrophobe si vos parents le sont.
Un célèbre cas est celui du personnage interprété par James Stewart dans le film d’Alfred Hitchcock Sueurs froides : sa peur du vide et des hauteurs est consécutive à une poursuite sur les toits de San Francisco qui s’était conclue par la chute d’un policier.
Traumatisé par cet accident, le héros du film ne peut même plus monter sur un escabeau sans être pris de… sueurs froides.
Pourquoi la peur du vide augmente avec l’âge
Normalement ces peurs psychologiques disparaissent avec l’âge, à l’image des peurs des enfants – des « monstres », des fantômes, du noir, du dentiste, de l’orage…
Parfois, ces peurs d’enfance ressurgissent, le plus souvent entre 15 et 25 ans. C’est alors qu’on parle de phobies.
La peur du vide serait la seule qui apparaît ou empire en vieillissant.
Pour au moins deux raisons :
– Votre sens de l’équilibre diminue avec les années, augmentant les risques de vertige, et modifie donc votre appréhension des hauteurs. Une étude américaine vient de démontrer qu’il existe un « cap des 40 ans ». Passé cet âge, le système vestibulaire, localisé dans l’oreille interne, fonctionne de moins en moins bien.
– Votre corps a conscience qu’il est moins résistant qu’avant et devient plus peureux. Selon le psychologue Kevin Gournay, spécialiste des phobies, l’instinct de préservation s’accentue : « Adulte, on a plus conscience de ce que l’on peut perdre et des conséquences pour nos proches s’il nous arrive quelque chose »
– De nombreuses femmes témoignent être devenues acrophobes … juste après avoir eu des enfants.
La peur du vide stimulerait l’immunité…
Si cette peur est handicapante au quotidien, il y a un point positif : le stress ressenti en hauteur pourrait stimuler votre système immunitaire.
Des biologistes chinois de l’université Tsinghua, à Pékin, viennent de rapporter ce mécanisme étonnant dans la revue Nature.
Ils ont placé des souris au sommet d’une plateforme élevée, déclenchant un réflexe de stress aigu. Les souris « stressées » fabriquaient plus d’anticorps et résistaient mieux à l’injection de microbes.
Ce stress des hauteurs activerait deux zones précises du cerveau, l’amygdale et l’hypothalamus, qui « exciteraient » la rate, l’organe chargé de produire les cellules immunitaires.
Cette découverte ouvre la voie à une approche prometteuse de la médecine : la « stimulation comportementale » du système immunitaire.
En vous exposant deux fois par jour pendant quelques minutes à la peur du vide, vous pourriez renforcer votre immunité, certains chercheurs l’affirment très sérieusement !
Quelques pistes pour surmonter votre peur du vide
Si votre peur du vide vous paralyse au point de vous interdire le plaisir de randonner, ou de changer une ampoule ; il existe des méthodes pour l’apprivoiser.
Le mieux est de vous « désensibiliser » en vous exposant petit à petit au vide, en douceur.
Certains thérapeutes spécialisés peuvent vous aider.
Des guides thérapeutes proposent des stages de deux ou trois jours en montagne, un peu comme il en existe pour surmonter la peur de l’avion (j’avais interviewé l’une d’entre elles dans le n°131 d’Alternatif Bien-Être).
D’autres proposent d’affronter votre peur en sécurité dans leur cabinet… en utilisant un casque de réalité virtuelle. Comme dans un jeu vidéo, vous franchissez des niveaux de difficulté jusqu’à ce que vous ayez dominé votre peur. L’environnement virtuel est tellement réaliste que votre cerveau réagit comme si vous étiez sur un pont ou en haut d’un immeuble.
Les études montrent que cette dernière approche est très efficace. Le simple fait de regarder des photos ou des films qui réveillent votre peur du vide vous aide à l’apprivoiser. À chaque fois vous reprogrammez votre « système d’alarme »… jusqu’à ce qu’il ne s’emballe plus.
Bonnes randonnées et portez-vous bien !
Rodolphe Bacquet
[1]« Vertige, un abîme de phénomènes, interview du Professeur Thomas Brandt, responsable de l’Institut des neurosciences cliniques à l’Université de Munich », Coop, 2 février 2015, disponible sur : https://www.cooperation.ch/rubriques/lifestyle/reportages/2015/vertige-un-abime-de-phenomenes-58157/
[2] LYNNE A. Isbell, The Fruit, the Tree, and the Serpent, Why We See So Well, 2009
[3] HUPPERT Et al, « Down on heights? One in three has visual height intolerance », Journal of Neurology, février 2013, doi:10.1007/s00415-012-6685-1. ISSN1432-1459. PMID23070463.
[4] TEGGI R. et al. « Height intolerance between physiological mechanisms and psychological distress: a review of literature and our experience », Acta Otorhinolaryngol Ital. 2019 Aug; 39(4): 263–268, https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC6734202/
[5] JUAN M. C.; et al. « An Augmented Reality system for the treatment of acrophobia », Presence, 2005, doi:10.1162/pres.15.4.393
[6] Bermúdez Rey MC, Clark TK, Wang W, Leeder T, Bian Y and Merfeld DM (2016) Vestibular Perceptual Thresholds Increase above the Age of 40. Front. Neurol. 7:162. doi: 10.3389/fneur.2016.00162, disponible sur :
https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fneur.2016.00162/full
[7] ZHANG X. et al., « Brain control of humoral immune responses amenable to behavioural modulation» Nature581, 204–208 (2020). https://doi.org/10.1038/s41586-020-2235-7
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Je souhaite m inscrire à la Nathuropathie pour tous de Rodolhe Pacquet et Anne portier.merci pou votre aide
Bonjour Jocelyne,
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Bien cordialement,
L’équipe Alternatif Bien-Être
La piste du casque de réalité virtuelle semble intéressante et j’aurais bien apprécié avoir des références ou des pistes pour en acquérir un qui propose cette thérapie.