Chers amis,
Le mois dernier, réagissant au cas d’un ami qui sortait de séances de chimiothérapie, j’avais partagé avec vous son expérience concernant ses « vibrisses », c’est-à-dire les poils de nez, et leur importance méconnue pour la santé[1].
« Tu m’as fait de la pub ! », commentait peu après cet ami en rémission.
Puis, quelques jours plus tard, alors que nous nous croisions de nouveau, il me dit : « J’ai un autre sujet pour toi ! »
Et cet ami de m’entretenir de la repousse de ses poils sur une zone plus… intime.
Eh bien, chiche !
Je vais vous parler de poils pubiens.
Ne faites pas cette moue : c’est un sujet très sérieux.
Mais, n’en déplaise à mon ami, ce sera ici un sujet essentiellement féminin ; qui peut sembler hors saison – peu de femmes s’épilant le maillot en novembre.
Vous allez voir au contraire que c’est sans doute la meilleure saison pour leur laisser un peu de répit.
On est passé des « sans-culottes » aux « sans-poils »… mais est-ce si révolutionnaire que ça ?
Le « maillot classique », triangle pileux, n’a plus la cote. Ni même le « maillot brésilien » avec sa tonte plus échancrée.
Aujourd’hui c’est surtout le ticket de métro : l’épilation totale des lèvres et du pubis à l’exception d’une fine bande pileuse, voire le retrait total des poils : l’épilation intégrale.
Selon une étude menée en 2016 par des chercheurs de l’Université de Californie[2], plus de la moitié des femmes pratiquent l’épilation intégrale.
21 % d’entre elles le font pour faire plaisir à leur partenaire, et la moitié par souci hygiénique (ce qui, vous allez voir, est une funeste erreur)…
Ça n’a rien de révolutionnaire. C’est, en réalité, cyclique et culturel.
L’épilation du pubis chez les femmes n’a jamais été un acte anodin.
À Babylone, l’épilation du pubis était la punition pour trahison réservée aux femmes.
Dans l’Antiquité, en Égypte, en Grèce ou encore à Rome, l’absence de poils pubiens était, elle, souvent perçue comme un symbole de pureté et d’hygiène.
D’après l’auteur grec Aristophane, il s’agissait pour les femmes de se distinguer des hommes : la toison, ou « végétation », était un signe de virilité ; le pubis glabre, un signe de féminité – distinction que l’on retrouve sur les statues antiques !
En effet, sur les statues grecques (puis, bien plus tard, sur celles de la Renaissance), le pubis des femmes est lisse, tandis que celui des hommes est « touffu »[3].
Les femmes utilisaient des méthodes parfois rudimentaires comme des pierres ponces ou des mélanges sucrés, ancêtres de l’épilation orientale, pour éliminer leur pilosité.
Durant le Moyen Âge en Europe, ces pratiques se sont raréfiées, la nudité étant taboue et les poils corporels davantage tolérés.
À la Renaissance, l’épilation partielle du pubis revenait dans les modes aristocratiques, souvent dissimulée sous des postiches appelés « merkins »[4].
L’épilation du pubis était, alors, un véritable enjeu d’hygiène : les prostituées se rasaient en effet le pubis… pour éviter les morpions !
À l’époque moderne, notamment dans la seconde moitié du XXème siècle, et sous l’influence de la publicité, la mode des maillots de bain et de la lingerie a largement influencé les standards esthétiques, favorisant des pratiques d’épilation plus systématiques, sous des prétextes d’hygiène.
En réalité, c’est plus compliqué que ça et, surtout, c’est une dangereuse erreur.
Un souci d’hygiène ? Non : l’influence de la pornographie !
À notre époque, la mode de l’épilation du pubis n’a plus aucune justification hygiénique.
Le fait d’avoir un « sexe chauve » aurait en effet une utilité si vous étiez une courtisane et souhaitiez éviter autant que possible, comme je le disais plus haut, les morpions !
La « mode » épilatoire contemporaine a deux origines : la publicité et la pornographie.
Pour la publicité, ça me paraît assez évident, je n’insiste pas.
Pour la pornographie, c’est plus méconnu, et aussi plus intéressant.
Aux États-Unis, le code Hays, qui régentait ce qu’on avait le droit de montrer à l’écran ou non, interdisait la représentation des poils pubiens afin d’éviter de montrer des sexes à l’écran[5].
Résultat : les producteurs de films pornographiques demandèrent à leurs acteurs de s’épiler ! Ainsi ils pouvaient montrer des sexes… en toute légalité.
Le même phénomène, avec la même cause, se produisait en parallèle au Japon[6].
En France, la « censure » des poils pubiens n’a jamais été décrétée mais l’influence culturelle des États-Unis et du Japon, deux pays gros producteurs de matériel pornographique, a fini par gagner l’Europe.
La conséquence de cette influence « culturelle » sur le pubis des Françaises fut analysée dans une étude de l’IFOP il y a dix ans, mettant en évidence le lien entre consommation de contenus pornographiques et épilation du pubis chez les femmes[7].
On observe en effet un lien spectaculaire entre les pratiques d’épilation et :
- l’âge des femmes (plus elles sont jeunes, plus elles s’épilent « radicalement ») ;
- le fait qu’elles consomment ou non des contenus pornographiques ;
- les « préférences » de leur partenaire masculin… qui dépendent elles-mêmes de la consommation par celui-ci de contenus pornographiques !
Ce dernier point – les hommes – nous fait revenir à notre point de départ.
Car, ironie de l’histoire, l’épilation du pubis gagne également les jeunes hommes !
Ainsi, cette épilation pratiquée dans l’Antiquité et à la Renaissance comme un signe distinctif de la féminité « gagne » la gent masculine. Je vous laisse en tirer vos propres conclusions.
Aujourd’hui, cette pratique devenue très tendance inquiète, car à force de faire la guerre aux poils, on a oublié leur rôle propre.
Les poils pubiens ne sont pas là par hasard
Si au cours de son évolution, l’être humain a conservé une pilosité à des endroits stratégiques, ce n’est pas pour rien.
Ces poils assurent quatre rôles essentiels :
- protéger la peau fragile de la zone contre le frottement avec les tissus des vêtements ou la peau du partenaire, ou celui entrainé par l’activité physique ;
- offrir un rempart contre les virus et bactéries, aidant ainsi à réduire le risque d’infection ;
- contrôler l’humidité propice aux infections à levures ;
- et, selon les différentes périodes du mois, transmettre des messages moléculaires entre partenaires sexuels. Les poils pubiens sont en effet des capteurs de phéromones !
Moins de poils, plus de problèmes
Les problèmes engendrés par le retrait des poils pubiens sont donc plus graves qu’on ne le croit.
Leur retrait engendre un risque important de micro-blessures avec irritation et inflammation des follicules pileux.
Des chercheurs de l’Université du Texas ont sondé 333 femmes sur le sujet. Parmi les 87 % d’entre elles qui s’épilaient tout ou en partie, 60 % ont connu au moins une complication comme l’abrasion épidermique ou les poils incarnés[8].
Les femmes en surpoids ou obèses y étaient plus exposées.
Mais ce n’est que le début car ces micro-blessures sont des portes à bactéries et virus.
La zone génitale, chaude et humide, est en effet un « milieu de culture heureux ».
Selon une étude publiée dans Sexually Transmitted Infections[9], on peut établir une véritable corrélation entre infections sexuelles transmissibles et épilation.
Sur les 7500 Américains sondés, 13 % ont contracté herpès, virus du papillome humain (le HPV), syphilis, Molluscum, blennorragie, Chlamydia, HIV, soit 8 % des non épilés, 14 % des épilés et 18 % des adeptes de l’épilation intégrale !
Il est assez vertigineux de songer que la prévention anti-HPV, sous le prétexte de laquelle les autorités françaises essaient de justifier leur campagne nationale de vaccination (de Gardasil et de Cervarix) auprès des adolescents[10], devrait, en première intention, débuter par une information claire sur le rôle des poils pubiens !
Comment prendre soin de vos poils pubiens
Pour profiter de leurs bienfaits tout en évitant les désagréments, voici quelques conseils :
- Hygiène régulière : Lavez quotidiennement la zone avec un savon doux et non irritant.
- Hydratation : Utilisez une crème hydratante sans parfum pour éviter la sécheresse ou les irritations cutanées.
- Taillage : Si vous souhaitez les raccourcir, utilisez une paire de ciseaux désinfectés ou une tondeuse réglable pour éviter les coupures.
Aujourd’hui, l’épilation intégrale ou partielle reste associée à une idée de propreté (à tort, nous l’avons vu) ou de sensualité (ça, c’est affaire de goût), bien que ces normes soient largement façonnées par les industries de la mode et de la beauté.
Si, pour X raisons, vous souhaitez épiler cette partie de votre intimité, plutôt que d’opter pour l’épilation intégrale, favorisez les épilations qui ne touchent pas à la région des muqueuses et de la vulve.
Évitez le rasoir. Une étude française menée sur 30 patients atteints de Molluscum contagiosum[11] (petits boutons extrêmement contagieux qui, grattés, favorisent d’autres infections comme les verrues génitales) révèle que 93 % avaient fait une épilation. 70 % avaient utilisé un rasoir, 13 % une tondeuse et 10 % de la cire.
Enfin, assurez-vous une hygiène stricte : ne partagez jamais rasoir, épilateur, spatules de cire ; changez de spatule pour chaque zone et évitez les sous-vêtements synthétiques qui génèrent frottements et macération au contact de la peau.
Portez-vous bien,
Rodolphe
[1] https://alternatif-bien-etre.com/alimentation/la-chimio-le-chat-et-ce-poil-si-utile/ – Rodolphe Bacquet, « La chimio, le chat et ce poil si utile », site d’Alternatif Bien-Être, 9 octobre 2024
[2] Tami S. Rowen, MD, Thomas W. Gaither, BS; Mohannad A. Awad, MD et al. Pubic Hair Grooming Prevalence and Motivation Among Women in the United States JAMA Dermatol. 2016;152(10):1106-1113.
[3] https://www.persee.fr/doc/rbph_0035-0818_2000_num_78_1_4431 – Gerrit Cootjans, « Le pubis, les poils pubiens et l’épilation : sources grecques », in. Revue belge de philologie et d’histoire, n°78, 2000
[4] https://urbania.fr/article/la-petite-histoire-du-merkin-ou-perruque-de-pubis – Pauline Allione, « La petite histoire du merkin, ou “perruque de pubis” », Urbania, 17 janvier 2023
[5] « Le petit guide des publications pornographiques, spécial épilation », in. Le Magasin universel, no 1, 1993
[6] A. Allison, « Cutting the fringes : pubic hair at the margins of Japanese censorship laws » in Hair. Its power and meaning in Asian Cultures, A. Hiltebeitel. & B. D. Miller (eds), Albany, State University of New-York, 1998 (p. 195-217)
[7] https://www.ifop.com/wp-content/uploads/2018/03/2609-1-study_file.pdf – François Kraus, « Enquête sur l’influence des films X sur le rapport au corps et à la vie sexuelle des Français », IFOP, 21 avril 2014
[8] Flores M, Hirth J, Berenson A, DeMaria A. Complications related to pubic hair removal, in. American Journal of Obstetrics & Gynecology, 2014
[9] E Charles Osterberg, Thomas W Gaither, Mohannad A Awad et al. Correlation between pubic hair grooming and STIs: results from a nationally representative probability sample, in. Sex Transm Infect doi:10.1136/sextrans-2016-052687
[10] https://alternatif-bien-etre.com/alternatif-bien-etre/alerte-macron-annonce-la-generalisation-dun-vaccin-contenant-de-la-mort-aux-rats/ – Rodolphe Bacquet, « Alerte : Macron annonce la généralisation d’un vaccin contenant de la mort aux rats », site d’Alternatif Bien-Être, 28 février 2023
[11] François Desruelles et al. Lettre publiée en ligne. Sex Transm Infect,19 Mars 2013
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En soumettant mon commentaire, je reconnais avoir connaissance du fait que Total Santé SA pourra l’utiliser à des fins commerciales et l’accepte expressément.
Bonsoir, votre article n’est pas nouveau puisque vous avez déjà abordé le sujet.
Je ne suis pas d’accord avec vous, puisque les petites filles n’ont pas de poils et sauf erreur, elles ne rencontrent pas de problèmes ‘d’hygiène’. Les poils ne sont pas hygiéniques puisqu’ils sont sources de bactéries à cause des pertes vaginales ou menstruelles et exigent, donc, des femmes de se soucier particulièrement de la toilette de cet endroit.
Lorsque j’étais marié, j’avais demandé à ma femme de s’épiler pour éviter de brouter de l’herbe lors du cunnilingus, ce qu’elle a refusé, alors qu’elle me demandait de me raser parce qu’elle ne voulait pas embrasser des poils. Vous voyez l’ironie. Je lui ai donc dit donnant-donnant, je me raserai si tu t’épiles (pas forcément intégralement mais à minima la zone autour du clitoris). Et non, je ne regarde pas de pornographie, j’ai juste trouvé intéressant le fait de ne pas à avoir à jouer les chèvres en faisant plaisir à ma femme.
Tout comme les moustaches et la barbe chez un homme qui est un nid à bactérie.
Le seul point sur lequel vous avez raison, ce sont les poils incarnés, qui peuvent poser problème.
Cordialement
Depuis des années, je lave cette zone bien particulière avec un sopalin et de l’eau pure, sans savon même le plus doux et bio, depuis plus jamais d’infection urinaire. De temps en temps, je mets avec le bout de mon doigt 3 à 4 gouttes d’huile de sésame, ou d’Argan de jojoba … pour éviter les divers ingrédients des crèmes hydratantes même bio. Merci de vos articles pleins de bon sens et d’informations
L’utilisation d’huiles végétales (macadamia, germe de blé, etc) peut-elle servir à hydrater cette zone sensible ?
Je suis entièrement d’accord avec vous et pour appuyer votre article il faut dire aussi que depuis quelques années on ne rase plus la partie qui doit être opéré pour éviter les infections dûes aux micro fissures du rasage ou épilation et aussi que la repousse des poils donne la sensation de démangeaison ainsi qu’un grattage. J’étais infirmière et j’ai connu les différents protocoles.