Chers amis, 

A mesure que nous nous éloignons de la crise mondiale du Covid, les langues commencent à se délier sur les dessous de la gestion locale de cette crise. 

L’une de ces langues est suisse, et n’appartient pas à n’importe qui : il s’agit d’Ueli Maurer, ex-président de la Confédération Helvétique et ancien membre du Conseil Fédéral. 

Bien que les Suisses soient connus pour leur esprit de concorde et de neutralité, Ueli Maurer frappe fort : il remet en cause l’utilité des vaccins, accuse des pharmas d’enrichissement indécent et pour finir parle d’« hypnose de masse[1] » aggravée par une presse dépourvue d’esprit critique. 

Bref, il reprend à son compte ce que peu d’entre nous disions au plus fort de cette crise. 

Mais pourquoi maintenant ? 

Qui est Ueli Maurer, ex-président de la Suisse, et pourquoi balance-t-il maintenant ses quatre vérités au sujet de la gestion de la crise Covid ? 

La Suisse a un système de gouvernance très, très différent de celui de la France. 

Et pas seulement parce que le pays est l’un des rares, en Europe, à exercer la démocratie directe sur toutes les décisions d’ordre politique, social, économique ou législatif. 

Ainsi, les Suisses se prononcent trois à quatre fois par an, lors de « votations », sur une dizaine de questions en moyenne, allant de la durée du congé parental au maintien ou non d’une redevance audiovisuelle. 

(Là où, en France, on consulte directement les citoyens par referendum tous les… je vous laisse remplir le blanc)

C’est le Conseil Fédéral, la plus haute instance du pays, qui constitue « l’exécutif » de la Confédération Helvétique ; ce conseil est constitué de sept personnes – les conseillers fédéraux – représentant tous les grandes tendances politiques du pays. 

La présidence de la Confédération est tournante : chaque 1er janvier, c’est l’un des sept conseillers fédéraux qui endosse ce rôle représentatif.

Ueli Maurer a été conseiller fédéral durant 14 ans et Président de la Suisse à deux reprises, en 2013 et 2018. 

C’est donc un homme d’État aguerri… qui pourtant vient de donner un coup de pied dans la fourmilière. 

La raison pour laquelle il le fait maintenant n’est pas très compliquée : Ueli Maurer a démissionné de son poste de Conseiller fédéral il y a un an, et se retrouve donc libre de s’exprimer en toute liberté.

« La crise est davantage gouvernementale que sanitaire »

En réalité, la gestion de la crise du Covid est probablement la raison profonde de sa démission il y a un an. 

Tant qu’ils sont en exercice, les conseillers fédéraux sont tenus de respecter la « collégialité », c’est-à-dire rester solidaires politiquement. 

Mais dès 2021, Ueli Maurer a dérogé à ce principe de collégialité, dénonçant la « pensée unique corona »[2]et admettant que la gestion de la crise du Covid par le Conseil fédéral avait été mauvaise, la crise étant « davantage gouvernementale que sanitaire »[3].

Un an après avoir tenu ces propos, il démissionnait. 

Et retrouvait sa liberté. Dont il vient de faire usage. 

Le covid, une « hystérie sciemment attisée »

Depuis sa démission, Ueli Maurer lâche régulièrement des petites « bombes » qui mettent en émoi ses ex-collègues du Conseil Fédéral. 

Le journal suisse-allemand NZZ am Sonntag les a répertoriées[4] : 

  • Sur les vaccins : « Nous avons fait croire que nous avions des vaccins qui étaient absolument utiles, mais ils contenaient en réalité plus d’air chaud que de contenu » ;
  • Sur la gravité de la crise : « il était en réalité évident dès le début que cela ne pouvait pas être aussi grave que ce qui a été présenté », mais les Autorités ont réagi de façon anxieuse, peur relayée par des médias « sans aucun esprit critique ».
  • Sur le rôle de l’industrie pharmaceutique : « toute l’industrie pharmaceutique était derrière tout ça, ils ont gagné de l’argent avec ça ».

En somme, la crise du Covid était, d’après Maurer, une « hystérie sciemment attisée ».

Les réactions de la classe politique suisse sont… amusantes. Oui, amusantes, j’ose le mot ; d’abord parce que leur désapprobation (prévisible) est infiniment plus policée qu’elle l’aurait été en France.

Un autre ancien conseiller fédéral a ainsi déclaré : « Des attaques d’une telle virulence ne correspondent pas à l’attitude attendue des anciens conseillers fédéraux.[5]»

Bon, soit. Mais surtout, la classe politique – dont le propre parti de Maurer – lui reproche « une attaque violente contre l’une des industries les plus importantes et les plus prospères de notre pays ».

Attention, on ne touche pas aux fleurons de l’économie ! 

Quoi que l’on pense des propos d’Ueli Maurer, il est courageux de les avoir tenus. 

Je ne peux qu’espérer qu’avec le recul, beaucoup de personnalités politiques qui étaient aux responsabilités durant la crise du Covid oseront assumer le caractère disproportionné et illusoire de beaucoup de leurs mesures. 

Mais, surtout, il faut espérer que cela fera réfléchir les personnes qui seront au pouvoir lors d’une prochaine pandémie. 

Vœu pieux, j’en ai bien conscience. 

Alors, on peut espérer avec un peu plus de foi que les populations se laisseront, alors, moins gouverner par la peur et l’intimidation. 

Portez-vous bien, 

Rodolphe Bacquet


[1] « La Pandémie était une hypnose de masse », Le Matin, 21 janvier 2024
https://www.lematin.ch/story/ueli-maurer-la-pandemie-etait-une-hypnose-de-masse-103025168

[2] Arthur Grosjean « Maurer peste contre la « secte » des sept Sages » 24 heures, 2021

[3] Bernard Wuthrich « Le Conseil fédéral n’a rien à dire sur Ueli Maurer » Le temps. 2021
https://www.letemps.ch/suisse/conseil-federal-na-rien-dire-ueli-maurer

[4] Florent Quiquerez « Pour Maurer, le Covid était une « hystérie sciemment attisée » » TdG.
2024

[5] Ibid.