Chers amis,
En cette période je ne serai pas avare de bonnes nouvelles.
En voici une qui nous démontre que la vie est décidément astucieuse, ingénieuse et surprenante : le rhume – le rhume banal – pourrait nous protéger du Covid-19.
Ne souriez pas. Une étude parue dans la revue de l’association américaine de microbiologie fait la lumière sur ce mécanisme simple comme bonjour et pourtant implacable.
Les petits coronavirus aux mouchoirs
Le SARS-CoV2, le virus qui produit la maladie appelée Covid-19, est un coronavirus, vous le savez.
Par raccourci nous l’appelons même « le » coronavirus… mais vous le savez aussi, ce n’est qu’un représentant parmi beaucoup d’autres d’une famille pléthorique.
Un autre représentant « célèbre » si j’ose dire, est le coronavirus à l’origine du syndrome respiratoire aigu, le SRAS, entre 2002 et 2004.
Il y en a bien d’autres, plus discrets, mais aussi beaucoup plus répandus.
En tout, sept d’entre eux sont ou ont été capables d’infecter l’humain, et quatre en particulier circulent depuis des décennies.
Permettez-moi de vous dévoiler leurs noms poétiques : 229E, NL63, OC43 et HKU1[1].
Je sais, on dirait des noms de robots sortis de Star Wars.
Ce qu’on sait moins, c’est que ces quatre coronavirus, identifiés depuis la fin des années 1960, sont responsables de 15 à 30% des rhumes courants.
Ainsi, si vous avez eu un rhume au cours des derniers mois, il y a 1 chance sur 7 au minimum, et jusqu’à 1 chance sur 3, d’avoir été contaminé par un coronavirus.
Et… c’est une excellente nouvelle.
Vous avez peut-être déjà eu un coronavirus dans votre corps
Le rhume est un terme générique pour désigner une infection provoquée par des familles très diverses de virus qui portent tous des noms charmants :
- les adénovirus,
- les rhinovirus qui font eux-mêmes partie de la famille des picornaviridés,
- et, donc, les coronavirus.
Nous attrapons ces virus exactement comme les virus de la grippe ou le Covid-19 : en respirant des gouttelettes porteuses de virus, en embrassant une personne contaminée, en touchant une surface, etc.
La bonne nouvelle c’est qu’en principe, en attrapant le virus responsable d’un rhume, nous développons des anticorps qui nous protégeront à l’avenir contre ce même virus.
Tout comme, dit-on, on ne se baigne pas deux fois dans la même rivière, on n’attrape pas deux fois le même rhume.
Eh bien, d’après les auteurs de cette étude publiée dans la revue de l’association américaine de microbiologie, attraper un rhume causé par un coronavirus pourrait développer dans votre système immunitaire des défenses contre l’ensemble de la famille des coronavirus, y compris donc le Covid-19… possiblement à vie.
Notre système immunitaire apprend ses leçons comme un écolier
De façon très intéressante, les auteurs de l’étude[2] rappellent tout d’abord que les 4 coronavirus impliqués dans le rhume et le SARS-CoV-2 responsable du Covid-19 ont des structures protéiniques différentes.
(Rappelez-vous : la spicule qui permet au SARS-CoV-2 de rentrer dans nos cellules, appelée « Spike », est une protéine, et c’est précisément cette protéine que les vaccins ciblent).
Du fait de cette différence structurelle, que l’infection préalable d’un sujet à l’un de ces quatre coronavirus à rhume puisse offrir une protection immunitaire au SARS-CoV-2 semblait jusqu’alors improbable.
Mais l’ampleur de l’épidémie a obligé les chercheurs à voir plus loin, et c’est ainsi qu’a été mis en évidence, chez des personnes non-infectées par le SARS-CoV-2… l’existence de défenses immunitaires identiques à celles développées par les patients remis du Covid-19 !!!
Comment est-ce possible ?
L’explication tient aux lymphocytes B.
Les lymphocytes B sont des globules blancs. Ils ont pour mission de fabriquer des anticorps spécifiques : ces anticorps sont le bras armé de notre organisme contre les pathogènes.
Mais chaque lymphocyte B ne peut lancer la production d’anticorps que contre une famille précise de pathogènes. C’est pourquoi on les appelle, en anglais, Memory Cells B : les « cellules mémoires B ».
Continuez à me suivre, vous allez voir.
Or, pour être doté de cette « mémoire », l’organisme d’un individu doit avoir déjà été confronté à un pathogène dont il va, donc, garder le souvenir.
Il faut imaginer l’immunité comme un parcours scolaire, en fait : chaque maladie est une leçon que notre système immunitaire apprend.
Lorsque le même pathogène est de nouveau confronté à notre système immunitaire, si ce dernier a bien appris sa leçon, il est capable de donner la bonne réponse, comme à une interro surprise !
C’est ce qui se passe avec de nombreux virus comme la varicelle : on l’attrape une fois, en général enfant, et on est ensuite protégé.
Par contre, si on ne rencontre pas la maladie durant l’enfance et que notre système immunitaire n’a pas eu l’occasion d’apprendre la leçon « varicelle » durant ses premières années, la maladie risque d’être beaucoup plus sérieuse (en l’occurrence un zona).
C’est pourquoi la démarche hygiéniste, consistant à protéger le petit enfant du plus de pathogènes possibles, est une aberration : on empêche ainsi le système immunitaire du petit d’apprendre les leçons…qui lui seront utiles plus tard dans sa vie.
Des lymphocytes B ayant appris à reconnaître les coronavirus
Pour ceux d’entre nous qui ont eu un rhume causé par l’un des quatre coronavirus c’est pareil : les lymphocytes B ayant « appris » ces virus seraient capables de reconnaître le SARS-CoV-2 et de produire des anticorps empêchant soit le virus de s’installer, soit de provoquer des symptômes.
Les chercheurs ont mis en évidence ce résultat en confrontant les analyses de sang de personnes non infectées par le SARS-CoV-2 à celles de patients ayant développé des formes du Covid-19 n’ayant pas nécessité d’hospitalisation, 4 à 9 semaines après leur infection.
Ils ont découvert que les personnes non-infectées par le SARS-CoV-2 disposaient d’anticorps contre les « coronavirus à rhume », indiquant qu’ils avaient, au cours de leur vie, attrapé l’un de ces 4 virus.
Ces expositions les avaient fait développer des anticorps spécifiques ciblant des protéines des 7 coronavirus pouvant infecter l’homme.
Mieux encore : les chercheurs se sont aperçu qu’une exposition à la souche de coronavirus OC43 permettait aux lymphocytes B de reconnaître précisément la fameuse « protéine S » du SARS-CoV-2, celle-là même ciblée par les vaccins à ARN.
Chez les patients infectés au SARS-CoV-2, les recherches indiquent que ceux-ci ont développé des anticorps solides qui devraient les protéger d’une réinfection (bref, d’attraper de nouveau le Covid-19)… mais aussi d’autres infections à coronavirus.
Nous pouvons en tirer deux conclusions complémentaires.
- Si vous avez eu un rhume récemment, il n’est pas impossible que celui-ci vous ait protégé contre le SARS-CoV-2, ce qui explique pourquoi il y a tant de personnes asymptomatiques.
Le rhume est une infection trop banale, malheureusement, pour effectuer à chaque infection un test pour identifier la souche responsable. Il serait donc compliqué de savoir si l’un de vos rhumes récents a été provoqué par l’un de ces coronavirus.
- Le corollaire, c’est que si vous avez été diagnostiqué positif au Covid-19… vous êtes probablement immunisé contre les rhumes provoqués par la famille des coronavirus!
C’est toujours ça de pris !
Portez-vous bien,
Rodolphe
[1] Centers for Disease Control and Prevention (2020). Human Coronaviruses Types. Concent source : National Center for Immunization and Respiratory Disease, Division of Viral Diseases. https://www.cdc.gov/coronavirus/types.html
[2] Nguyen-Contant, P., Embong, A. K., Kanagaiah, P., et al. (2020). S Protein-Reactive IgG and Memory B Cell Production after Human SARS-CoV-2 Infection Includes Broad Reactivity to the S2 Subunit. mBio Sep 11 (5) e01991-20. DOI: 10.1128/mBio.01991-20. https://mbio.asm.org/content/11/5/e01991-20
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En soumettant mon commentaire, je reconnais avoir connaissance du fait que Total Santé SA pourra l’utiliser à des fins commerciales et l’accepte expressément.
Merci pour cet article: à quelle date a-t-il été revu et finbalment publié ?
Voir sur le m^me sujet et sur la durabilité de protection des anticorps un autre article plus récent et encore plus explicite:
« Immunological memory to SARS-CoV-2 assessed for up to 8 months after infection » bu y Jennifer M. Dan et al.
published 5 janv 2021 in Science
eabf 4063
DOI: 10.1126/scince.abf4063
Par ailleurs, il m’intéresserait de voir précisés les mécanismes de l’interférence virale, m^me en présence d’autres virus patogènes (ou restes de virus) ou bactéries que de la famille des coronavirus; par exmple, pourquoi les personnes vaccinées par le BCG sont p déjà protégées contre la prilmo-infection par le SARS-Cov-2 ?
charignonphil@gmail.com
Article très intéressant mais en effet il y a une erreur concernant la varicelle. Cette maladie bénigne dans l’enfance, est plus grave si on l’attrape pour la première fois à l’âge adulte (risque de complications telles que pneumonie ou encéphalite) mais ce n’est pas le zona. Lorsqu’on a eu la varicelle, on ne peut pas l’avoir une deuxième fois car notre corps a développé des défenses immunitaires contre ce virus. Cependant, le virus responsable de cette maladie n’a pas été totalement éliminé de l’organisme et reste en dormance, caché dans les ganglions nerveux. Il va profiter d’une baisse immunitaire (fatigue, stress, vieillissement…) pour se multiplier à nouveau mais ne pourra pas réinfecter tout le corps car le système immunitaire le connaît déjà et l’en empêche. Le zona, c’est cette ré-infection localisée au niveau du ganglion nerveux et de la peau à proximité.
Rien à voir avec cette lettre mais sauriez vous me renseigner sur le vaccin PASTEUR EST IL PREVU pour les vaccinations à venir SVP.? -merci bonne journée à vous
Très instructif cet article mais êtes-vous scientifiquement assuré que les cas asymptomatiques de la Covid 19 sont dus au bénéfice d’un rhume ? A t-on établi une relation déterminante indubitable entre les deux phénomènes ou n’est-ce qu’une hypothèse de plus ?
La troisième hypothèse : il suffirait d’inoculer ce rhume à tout le monde pour stopper le coronavirus?
Dans mon précédent commentaire lire immunité et non unité.Merci
Merci pour votre article succinct et concis qui m’a appris bien des choses.Ce qui explique l’unité chez les enfants mais aussi comment en tant qu’adulte appréhender les choses.
Bonjour et merci pour cet article qui nous rendrait presque heureux d’avoir un rhume ! Mais est ce le bon? Une précision : lors de mes études de médecine j’ai appris que le zona est une réactivation du virus chez une personne qui a déjà eu la varicelle, et non une primo infection.
Portez vous bien
Anne Marie
Merci beaucoup pour cette nouvelle lettre sur vos recherches, si précieuses, je suis en plein rhume, et tout ceci me rassure ayant été testée négative il y a 4 jours je suis également vaccinée contre la grippe tous les ans ayant 73 ans passés une lectrice très fidèle sincèrement salutations
Très intéressant…Merci………je partage
Intéressant. Mais alors comment expliquer que des personnes ont attrapé 2 fois le Covid-19?
Désaccord à propos de la varicelle et du zona.
C’est parce qu’on a eu la varicelle (enfant) qu’un zona risque de nous arriver, lorsque notre système immunitaire est affaibli ; cela m’est arrivé après un traitement antibiotique prescrit exagérément par un dentiste.
C’est une excellente nouvelle. Si on suit votre raisonnement les personnes « agées sont peut-etre fragiles mais sont aussi sans doute en grange partie immunisées naturellement du fait de tous les coronavirus qu’elles ont rencontré dans leurs vies !
Merci pour ces précisions qui vont à contre courant des infos anxiogènes incessantes !!
Bonne journée
Bonjour,
Il me semble que vous vous trompez quand vous parlez de la varicelle et du zona : seules les personnes ayant eu la varicelle peuvent développer un zona. C’est le contre-exemple à votre démonstration. Ou j’aurais mal compris ce que vous voulez dire?
Cordialement