Ce trait de personnalité paradoxal… est vital !

Chers amis,

Un trait de personnalité que j’aimerais vous inviter à développer est Gajuh taygay.

Ces mots viennent du dialecte d’Okinawa, archipel au sud du Japon dont je vous parle régulièrement pour sa forte concentration de centenaires. 

« Gajuh » pourrait se traduire par « coriace », « dur à cuire ».

« Taygay » par « cool », « relax ».

Autrement dit : « coriace cool ».

A priori ces deux traits de caractère ont peu de choses en commun !

Et pourtant c’est l’un des secrets de la longévité exceptionnelle des habitants de cet archipel. 

Il ne relève pas du patrimoine génétique mais du mode de vie.

L’archipel des coriaces cools

Si je vous demande de me décrire la personnalité d’un Japonais « typique », vous me direz probablement qu’il est :

  • Ponctuel ;
  • Très soucieux des règles (limite « psychorigide ») ;
  • Tiré à quatre épingles.

J’aurais dit pareil !

En débarquant à Okinawa, je me suis vite rendu compte que les Okinawaïens :

  • Ne sont jamais à l’heure et s’en contrefichent ;
  • Ont un rapport, disons… très « détendu » aux règles ;
  • Ont un accoutrement « décontracté ».

Okinawa traîne donc la réputation d’être un endroit où rien ne commence à l’heure et où les habitants sont désorganisés et dépourvus d’ambition[1].

Lors de mon tout premier séjour, j’ai été désarçonné par cette différence de personnalité entre les Japonais typiques et les Okinawaïens.

Les taxis que je prenais arrivaient en retard, les bus n’étaient pas à l’heure… et cela ne posait de problème à personne !

Regardez cette vidéo que j’ai tournée justement dans un taxi, à Naha, la capitale d’Okinawa : 

Nous étions retenus par un interminable feu rouge ou par la circulation. 

Notre chauffeur de taxi, plus de toute première jeunesse, plutôt que de s’énerver contre le trafic, a sorti son shamisen, sorte de guitare à trois cordes, et a commencé à jouer !

Vous remarquez dans la vidéo qu’il porte une chemisette (nous étions en novembre) : les hommes sont tous en chemisette, souvent à motifs hawaiiens.

Très cools, vous dis-je !

Des études menées par le Dr Makoto Suzuki et les frères Willcox ont confirmé que l’écrasante majorité des habitants d’Okinawa avaient un type de personnalité de type B, particulièrement résistant au stress, et opposé aux « personnalités de type A » définis par Mayer Friedman et Ray Rosenman, davantage exposés aux maladies cardiovasculaires[2].

Car ce trait de personnalité taygay est donc aussi et surtout un trait culturel et c’est son association à la « coriacité » qui explique que les Okinawaïens sont toujours là !

Malmenés par l’Histoire, mais tranquilles

Rappelons que l’archipel d’Okinawa a été, en 1945, l’un des plus sanglants champs de bataille de la Guerre du pacifique, au moment de la seconde guerre mondiale.

La bataille d’Okinawa a duré deux mois et a débouché sur la destruction de 90% des bâtiments de l’archipel et surtout sur d’atroces massacres au lance-flamme et des suicides collectifs qui ont, en tout, coûté la vie d’environ 1/3 de sa population[3].

À la fin de la seconde guerre mondiale, Okinawa a été occupé pendant plusieurs décennies par les États-Unis, qui y ont toujours une base militaire.

Les Okinawaïens n’ont donc vraiment pas été épargnés par les vicissitudes du XXè siècle et ont eu plus que leur lot de traumatismes collectifs… et de stress.

D’après le Dr Makoto Suzuki et les frères Willcox, pionniers de l’étude des centenaires d’Okinawa, l’exceptionnelle longévité de la génération ayant survécu à la bataille d’Okinawa tient à cette personnalité de Gajuh Taygay, mêlant résistance au stress et détermination. 

Pour reprendre un terme cher au psychologue contemporain Boris Cyrulnik, ce caractère « coriace cool » est sans aucun doute la pierre de voûte de leur résilience.

L’art de toujours rebondir 

Discuter avec des séniors d’Okinawa permet de mieux comprendre la puissance de résilience associée à ce caractère « coriace cool » : beaucoup ont eu des histoires dures, voire tragiques.

Parfois uniques survivants de leurs fratries, ayant tout perdu – maison, cultures, parfois même enfants – mais s’étant relevé et ayant recommencé leur vie.

Une étude coordonnée par Michel Allard sur les centenaires au début des années 1990[4] avait déjà permis d’identifier un « profil psychologique » de celles et ceux qui vivent plus longtemps et en meilleure santé :

  • Indépendants
  • Actifs
  • Responsables
  • Consciencieux
  • Ouverts
  • Détendus
  • Joyeux et même facétieux…

…opposés à des traits qui sont aujourd’hui reconnus comme des facteurs de risque pour la santé en général que sont :

  • La passivité
  • L’anxiété
  • L’hostilité et l’agressivité
  • La culpabilité[5]…

C’est plus facile à dire qu’à faire, je le sais bien.

Nous vivons une période anxiogène, et qui peut nous mettre, à juste titre, en colère. L’équilibre est délicat à trouver entre la résignation et la résistance.

Mais je suis convaincu qu’il réside dans ces deux mots : Gajuh taygay

Pour vous y aider, vous pouvez recourir au programme vidéo que j’avais tourné avec Jean-Paul Curtay auprès des séniors d’Okinawa.

Il vous donne les moyens pratiques d’adapter leurs secrets de longévité à NOTRE mode de vie. 

Soyez, après l’avoir visionné, autant que possible « coriace cool » !

Portez-vous bien,

Rodolphe Bacquet


[1] Willcox B J, Willcox C D, Suzuki M (2001). The Okinawa Way: How to Improve Your Health And Longevity Dramatically. Michael Joseph, ISBN: 0718144945, 9780718144944. 

[2] Wikipédia. Théorie de la personnalité de type A et de type B. https://fr.wikipedia.org/wiki/Th%C3%A9orie_de_la_personnalit%C3%A9_de_type_A_et_de_type_B

[3] Wikipédia. Bataille d’Okinawa. https://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_d%27Okinawa#Pertes_japonaises

[4] Allard M. (1991). À la recherche du secret des centenaires. Broché, Paris. ISBN-10 : ‏2862742112.

[5] Dr Curtay J-P. Okinawa, un programme global pour mieux vivre. Le livre de poche, p.98.