Chers amis, 

Certains savourent déjà cette petite victoire. La chloroquine servira désormais à traiter les patients les plus gravement atteints par le virus, a décrété hier le gouvernement au Journal Officiel (JO) [1].

« L’hydroxychloroquine et l’association lopinavir/ ritonavir peuvent être prescrits, dispensés et administrés sous la responsabilité d’un médecin aux patients atteints par le Covid-19, dans les établissements de santé qui les prennent en charge, ainsi que pour la poursuite de leur traitement, si leur état le permet et sur autorisation du prescripteur initial, à domicile« , déclare le décret, signé par le Premier ministre Edouard Philippe et le ministre de la santé Olivier Véran.

Mais la prudence reste de mise. Le gouvernement agit d’après les recommandations du Haut conseil de la santé publique (HSCP), qui excluait, mardi 24 mars, hors protocole d’essai, l’utilisation de l’hydroxychloroquine en prévention et traitement, sauf « pour les cas présentant des signes de gravité« . [2]

Le décret du gouvernement limite exclusivement la prescription du traitement aux structures hospitalières et affiliées. Sauf dérogation exceptionnelle, votre médecin généraliste ou un spécialiste en centre de soins ne pourra donc pas vous prescrire de chloroquine.

Cette avancée timide traduit des réserves justifiées. Les biais méthodologiques de l’étude sur laquelle se fondent les résultats positifs du Pr Didier Raoult restent forts. Si l’étude a porté sur deux groupes de patients (un groupe traité et un groupe témoin) comme ce qui se fait habituellement, elle n’a pas été réalisée “en double-aveugle”. C’est-à-dire que l’équipe médicale a choisi elle-même la répartition, et les patients savaient à quel groupe ils appartenaient. Quand personne n’en a connaissance, y compris le personnel médical, et que les participants sont répartis par tirage au sort, l’étude garantit que personne ne puisse jouer sur les résultats et avoir un quelconque jugement ou a priori. Seules des relations de cause à effet seront observées : c’est le principe des études cliniques. [3]

À ce défaut s’ajoutent entre autres une taille des groupes trop faible et des symptômes trop variés pour avoir une idée précise de l’efficacité du traitement [4]. Non pas que le traitement ne soit pas efficace dans certains cas, mais le manque de rigueur de l’étude invite à la précaution. Si le Dr Zev Zelenko de l’état de New-York a annoncé avoir traité positivement 500 patients [5], d’autres études pointent une efficacité douteuse. En fait, nous n’en savons rien ! L’exportation de la chloroquine est interdite en partie à cause de cela. Le traitement reste cependant la meilleure solution à ce jour pour les cas les plus graves, c’est incontestable.

Cette piste prometteuse nécessite les résultats d’études plus approfondies. Ceux de l’essai clinique européen Discovery, coordonné par le consortium de recherches REACting, et qui portera sur au moins 5 groupes de patients issus de tout le continent, sont particulièrement attendus. L’OMS prépare quant à elle un vaste programme d’essais.

Nous vous tiendrons au courant des avancées, que nous espérons rapides et positives !

Portez-vous bien,

Oscar

[1] Journal Officiel du 26 mars 2020 disponible ici

[2] “Coronavirus: la prescription du Plaquenil, dérivé de la chloroquine, désormais autorisée en France”, France 24, 27 mars 2020, disponible ici

[3] “Chloroquine: les dessous d’une recherche controversée”, le Temps, 25 mars 2020, disponible ici

[4] “Etude randomisée”, Futura Sciences, disponible ici

[5] “#COVID19 : Un médecin américain aurait traité avec succès plus de 500 patients avec l’hydroxychloroquine”, Caducée.net,  26 mars 2020, disponible ici