Chers amis,
Les analyses sur les chiffres du virus abondent dans les médias depuis plusieurs jours. Dans un article publié le 6 mai, le World Economic Forum fait état de 250 000 décès et 3,6 millions de personnes infectées dans le monde[1].
Le taux de mortalité semble diminuer en France, les admissions en réanimation reculent et certains avancent que le virus ne serait pas pire qu’une grippe.
Voici quelques éléments pour vous aider à comprendre pourquoi il faut prendre les chiffres avec des pincettes.
Aucune certitude sur le nombre de morts officiels
Il est très difficile de réunir des chiffres fiables au niveau national et mondial.
À cet égard, la surmortalité ou l’excès de mortalité apparaît comme une solution intéressante. Elle représente, sur une période donnée, le nombre de morts en excès comparé à la moyenne des morts des années précédentes sur la même période, toutes causes confondues.
En comparant ce chiffre au nombre officiel de morts liées au virus, on se rapproche de la réalité.
Au 28 avril, les victimes du Covid-19 représenteraient en France 86 % des morts en excès, 71 % en Angleterre, 67 % en Espagne, 48 % en Lombardie, 48 % aux Pays-Bas, 44 % dans la région d’Istanbul et 5 % à Jakarta.[2]
Des paramètres très variables
Pourquoi de tels écarts ?
Comptabiliser tous les décès liés au virus est une gageure. Cela dépend du nombre de personnes testées, mais aussi de la fiabilité et de la fréquence des tests. Certains pays ont testé massivement leurs citoyens (Taïwan, Corée du Sud, Islande), d’autres non. La variabilité de ces paramètres explique d’ailleurs pourquoi comparer la mortalité entre les pays n’a pas grand sens.
La façon dont les morts sont recensés rend la tâche encore plus complexe. Des pays comme l’Espagne, très peu centralisée, ou l’Irlande, livrent leur chiffres très en retard.
Globalement, la plupart des morts officielles ont eu lieu dans les hôpitaux, en soins intensifs. Les personnes décédées avaient donc très souvent été testées.
Mais là encore, certains décès liés au virus n’ont sans doute pas été comptabilisés, vu la complexité des formes sévères de la maladie. La difficulté s’amplifie si l’on compte les personnes mortes suite à l’aggravation d’autres maladies. Et où se situent les morts du virus atteints de comorbidités à qui il ne restait que quelques années à vivre ?
Mais le doute plane surtout autour des personnes infectées, mortes et non recensées dans des établissements médicalisés pour personnes âgées (EHPAD), ou simplement chez elles. Leur nombre ne sera pas connu avant la fin de l’année, au moins.
Si la surmortalité reste la seule indication fiable à ce jour, cela peut évoluer très vite. Les chiffres actuels du virus nous permettent seulement pour le moment de tirer des conclusions hasardeuses.
Portez-vous bien,
Oscar
[1] Why the coronavirus death toll is misleading – and how we’ll get the true figures, Sean Flemming, World Economic Forum, 6 mai 2020.
[2] Why the coronavirus death toll is misleading – and how we’ll get the true figures, James Tozer, The Economist, 16 avril 2020.